Avec notre correspondant à Istanbul, Jérôme Bastion
Après Kanaltürk en début de matinée, Bugün TV, l’autre chaîne du groupe Koza-Ipek, est désormais coupée. L’annonce mardi 27 octobre de la nomination d’un administrateur pour ce groupe de média proche de Fethullah Gülen, et donc à ce titre accusé de soutenir le terrorisme, avait été qualifiée de journée noire pour la presse turque. Une couleur qu’elle avait souvent affichée en Une, signe de deuil.
Mais aujourd’hui, la profession et une bonne partie de l’opinion publique sont sous le choc. En tenue anti-émeute et devant les caméras, la police a investi à l’aube les locaux du groupe Koza-Ipek. Le rédacteur en chef de Bügun TV s’était retranché dans la régie pour commenter, micro en main, cet étrange coup de force avec des invités venus lui manifester leur soutien. A l’extérieur, les forces de l’ordre dispersaient à coups de gaz lacrymogènes et de canons à eau les manifestants et les employés qui résistaient.
Mais en milieu d’après-midi, c’en était fini. Une cohorte de policiers en civil a pris les commandes de la régie de diffusion et coupé le signal. A quatre jours des élections législatives anticipées, un scrutin critique pour l’AKP, ce coup de force fait craindre à beaucoup un véritable coup d’Etat du président Erdogan. La Turquie pointe à la 149e place sur 180 dans le dernier classement mondial de la liberté de la presse dressé par l’ONG Reporters sans frontières, derrière la Birmanie (144e) et juste devant la Russie (152e).