De notre envoyée spéciale à Lesbos, Juliette Gheerbrant
Sur le tout petit port de Molyvos, environ quarante Syriens dont près de dix enfants viennent de débarquer. Il est 21 heures samedi. Une femme pleure dans les bras de son mari, certains sont assis par terre, d’autres attendent des vêtements secs. Le petit Mahmoud, 10 ans, originaire d’Alep, cherche partout un téléphone portable pour appeler sa mère, restée en Turquie. Il a fait le voyage avec son cousin et ses grands-parents.
A peine une demi-heure plus tard, on voit marcher le long de la digue, 50 nouvelles silhouettes enveloppées dans des couvertures de survie qui scintillent dans la nuit. Les gardes-côtes viennent de porter secours à une autre embarcation. Mais cette fois, la situation est plus grave, explique le jeune capitaine visiblement bouleversé : un bébé a failli perdre la vie, il a heureusement pu être réanimé. Le bateau se remplissait d’eau, un accident qui arrive fréquemment.
A quelques kilomètres du port, une dizaine de volontaires efficaces se démènent auprès des nouveaux arrivants, pour distribuer chaussures, pulls, etc. ou apporter quelques mots de réconfort. Des soins médicaux, coordonnés par des ONG, WAHA et la Chaîne de l'espoir, sont assurés par des médecins bénévoles.
Médecins bénévoles
Sous une tente, deux lits de camp et quelques tables improvisées avec des cartons de médicaments et de matériel médical sont installés. Elisabeth Marcus est pédiatre, son mari Michel est lui généraliste à la retraite. Ils sont venus de France pour une semaine, comme médecins bénévoles. Une interprète égyptienne, venue de Londres, leur apporte son aide.
« En majorité, ce sont des personnes très angoissées, fatiguées par ce qu'elles ont vécu jusqu'à présent. Ce sont des gens qui ont parfois marché pendant des jours et des jours. Avant la traversée, très souvent, ils sont restés quatre à cinq jours dans la forêt en Turquie, avant que les passeurs les prennent. Tout cela, c'est extrêmement angoissant. Il y a des pathologies lourdes (...) », explique Elisabeth Marcus.
Aujourd'hui, pas de cas graves. Un migrant arrive avec un problème aux yeux. Sa paupière est enflée. Michel Marcus se veut rassurant : « Peut-être a-t-il été piqué, mais ce n'est pas grave. » Devant la tente, une jeune femme enceinte attend son tour.