Avec notre envoyée spéciale à Duisburg, Stefanie Schüler
En Allemagne, la nervosité est palpable. Rien que durant la journée de vendredi 11 septembre, quelque 10 000 personnes sont encore arrivées à Munich. Durant la nuit, la situation a failli déraper à la gare centrale. Les trains n’ont pas cessé d’arriver, et les centaines de bénévoles ne suffisaient plus pour gérer l’accueil des réfugiés. Les hébergements d’urgence sont pleins, d’autres sont ouverts à la hâte, mais même les moyens de transport pour répartir les réfugiés dans d’autres villes de la Bavière et d'ailleurs ont failli manquer cette nuit.
Pourtant, à en croire les prévisions des autorités allemandes, ces dernières 24 heures n’ont été que le prélude d’un nouveau week-end record. La ville de Munich accuse les autres Länder de ne pas être suffisamment réactifs. Les Länder, eux, reprochent la même chose au gouvernement fédéral. Et à Berlin, le ministre allemand de l’Intérieur, Thomas de Maizière, a déclaré que « le rythme avec lequel les réfugiés arrivent en Allemagne est élevé. Beaucoup trop élevé. Il faut à tout prix le ralentir. »
Mais comment faire ? En Allemagne, tout le monde réclame le soutien des autres pays d’Europe. Et tout le monde espère aussi que le ministre allemand de l’Intérieur ne rentrera pas bredouille, lundi 14 septembre, du conseil extraordinaire prévu avec ses homologues européens.
Le problème grandissant de l’hébergement
L'urgence aujourd'hui pour les autorités régionales allemandes, c'est de trouver des hébergements pour les dizaines de milliers de réfugiés qui arrivent. Mais comment fournir à chaque réfugié un abri, alors que les structures manquent ? La solution temporaire consiste à monter des tentes. Du temporaire qui risque de durer. « Ces tentes ne sont pas satisfaisantes du tout », témoigne pourtant Kaan Günes, membre de la Croix-Rouge allemande et directeur d'un village de tentes construit dans la ville de Duisburg, à l'ouest de l'Allemagne.
« Nous concentrons nos efforts sur les réfugiés pour qu'ils obtiennent malgré tout un minimum de confort. Ce n'est vraiment pas la solution idéale. Les autorités s'excusent en parlant de " marée humaine ". Je trouve ce terme franchement pas adapté. S'il est vrai que nous accueillons actuellement énormément de gens qui fuient leurs pays, la situation reste gérable », assure Kaan Günes.
Et de poursuivre : « Je pense vraiment qu'on pourrait faire autrement. Ces tentes devraient être la toute dernière solution. La Croix-Rouge, mon employeur, a décidé d'accepter la prise en charge de ces tentes. J'en ai honte. Beaucoup de promesses nous ont été faites ces derniers jours. La classe politique commence à changer son approche. Rien que le fait que les politiques s'emparent du problème est déjà un bon signe en soi. Parce que jusqu'à présent, on a fait semblant de ne pas voir la catastrophe. Mais là, il semble qu'on ait pris enfin conscience de la gravité de la situation. »
Duisburg débordée par l'afflux de réfugiés
« Nous ne laisserons personne sans abri. Avant l'arrivée de l'hiver, chaque réfugié aura un toit. » Voilà ce que promettait Hannelore Kraft, la chef du gouvernement de la Rhénanie-du-Nord-Westphalie, il y a pas si longtemps. Mais face à l'afflux massif des réfugiés, le Land est obligé de trouver des solutions temporaires. A Duisburg, ville de l'ancien bassin minier allemand, des dizaines de tentes blanches en coton imperméable s'alignent sur le terrain d'une usine désaffectée. Les femmes sont installées sur des tabourets au soleil. Un groupe d'hommes parlemente avec les travailleurs sociaux, en passant par un traducteur arabophone.
D'ici la fin du mois, certaines de ces tentes seront remplacées par des tentes plus grandes, en PVC, équipées de chauffage et d'un sol en dur. Elles résisteront à l'hiver, expliquent les autorités régionales. Cette solution ne satisfait personne. Un espace pour les enfants et les adolescents, avec des tables de ping-pong, un billard et un baby-foot, doit être mis en place. « On nous a donné des téléviseurs, avec lesquels nous aimerions installer des canapés et des consoles de jeux. En ce moment, la solidarité est telle que nous n'avons qu'à dire ce dont nous avons besoin pour que ça arrive au plus tard le lendemain », raconte Kaan Günes.