Avec notre envoyé spéciale à Lesbos, Charlotte Stiévenard
L'île de Lesbos, en Grèce. Les petits bateaux gonflables continuent d'arriver, notamment au nord de l'île où la distance avec la Turquie est réduite. Sur place, l'Etat est quasiment absent. En face de cette plage de galets, la Turquie n'est qu'à une petite dizaine de kilomètres.
Ce bénévole allemand, venu aider les réfugiés, scrute la mer avec ses jumelles : « On voit six bateaux, chacun ont 50, 60 voir 70 personnes dessus. Ce sont des canaux pneumatiques, ce qui veut dire que c'est une traversée très dangereuse. Quand ils arrivent, on essaye de les attirer correctement vers la plage, car s'ils arrivent de côté, beaucoup se retournent et il y a des blessés. »
A l'arrivée de ce bateau surchargé, la moitié des réfugiés sont trempés. Les bénévoles distribuent alors des couvertures de survie, de l'eau, un peu de nourriture. Adnan, un Syrien de 19 ans, pensait qu'il n'y aurait personne : « Ce sont des bénévoles qui viennent de Hollande, d'Allemagne. Il n'y a aucune institution, ni les Nations unies ni rien d'autre. Ce sont des jeunes qui veulent aider et changer les choses. On savait qu'on aurait à marcher. On ne pensait pas voir quelqu'un pour nous accueillir. »
Pendant une heure, des bateaux débarquent toutes les dix minutes. Lorsqu'ils mettent pied à terre, certains réfugiés applaudissent, d'autre pleurent ou s'embrassent. Ce Syrien est rassuré : « Le voyage s'est bien passé. Dieu merci. On est parti de Turquie, de la ville de Kucukkuyu, cela prend environ 40 minutes », relate-t-il.
Aussitôt arrivés, ils font un trou dans le bateau, de peur d'être remis dans le même bateau par la police et renvoyés en Turquie. Certains se prennent en photo, comme ce jeune Afghan : « Pour mes parents, surtout pour ma mère. » Selon la police, en ce moment, jusqu'à 4 000 personnes débarquent sur les côtes de Lesbos chaque jour. Ils doivent ensuite se rendre à Mytilène, le chef lieu de l'île à 60 km de là, pour être enregistré.
Le jeune Syrien Adnan a déjà effectué cette démarche. Avec son groupe, ils sont partis à pied à Mytilène. La première nuit, ils ont dormi dans la cour d'un café sur proposition du propriétaire. Par chance, un bus les a ensuite emmenés gratuitement. Mais beaucoup doivent marcher, comme l'explique ce bénévole allemand :
« D'ici, il y a environ 55 kilomètres jusqu'à Mytilène. La plupart vont faire ce chemin à pied, car il y a un manque d'infrastructures et il est interdit aux réfugiés par la loi de prendre des taxis, des bus ou de dormir dans des hôtels. »
Et ce, tant qu'ils n'ont pas été enregistrés. Des bus spéciaux ont été mis en place par le gouvernement, le Haut Commissariat des Nations unies pour les réfugiés et Médecins sans frontière. Mais jusqu'ici, ils sont irréguliers et pas toujours assez nombreux.