En Russie, des intégristes orthodoxes détruisent des œuvres d'art

En Russie, plusieurs actes de vandalisme ont eu lieu contre des œuvres qui ne plaisent pas aux intégristes orthodoxes. Le dernier en date a eu lieu à Saint-Pétersbourg où un bas relief représentant Méphistophélès a été détruit.

avec notre correspondante à Moscou, Muriel Pomponne

Méphistophélès est une représentation un peu naïve du diable. Ce Méphistophélès, ricanant, était sculpté sur un bas relief situé tout en haut d’un hôtel particulier à Saint-Pétersbourg, que l’on appelle la Maison de Lichnewski, du nom de son architecte. Elle date du début du XXe siècle. La semaine dernière, la figure a été entièrement détruite. L’action a été revendiquée par un certain Denis Gortchine, qui fait partie des Cosaques de Saint-Pétersbourg. « Nous avons détruit le diable » a-t-il écrit. 

Coups de marteau

Tout d’abord, les deux organisations officielles de cosaques ont pris leur distance, de même que l’Eglise orthodoxe, qui a regretté que l’on fasse un lien entre la construction d’une nouvelle église et la destruction de ce bas relief. Mais ce sont surtout les habitants de Saint-Pétersbourg qui ont exprimé leur colère. Dimanche, ils étaient près d’un millier, réunis devant la Maison Lichnewski, brandissant une photographie du bas relief, avec des slogans comme « Dieu est amour », « « Bas les pattes des œuvres d’art », « Les destructeurs de Saint-Pétersbourg devant le tribunal ». Certains ont souligné que ce Méphistophélès avait résisté à la Révolution, au blocus et à la guerre, pour disparaître sous les coups de marteau d’un fanatique. Et certains comparent cet acte aux destructions de Palmyre par le groupe Etat islamique.

Oeuvres «sataniques»

Cet acte de vandalisme n'est pas le premier. Mi-août, plusieurs personnes ont fait irruption dans la salle d'exposition du Manège près du Kremlin pour détruire des sculptures. Il s’agissait d’une exposition intitulée « Les sculptures que vous ne voyez pas », consacrée à des artistes de l’époque soviétique qui n’étaient pas dans la ligne officielle. Les œuvres détruites sont de Vadim Sidour auquel un musée est dédié à Moscou.

Ces œuvres évoquent la guerre, le totalitarisme, les souffrances humaines. Mais pour Dmitri Enteo, le leader d’un mouvement qui se fait appeler La volonté de Dieu, elles sont « sataniques » et « blasphématoires ». D’après la direction du musée, les assaillants voulaient tout détruire. Dmitri Enteo lui-même a appelé la police pour faire fermer l’exposition en vertu d’une loi qui condamne « l’offense au sentiment religieux des croyants ». Il n’a pas été suivi. L’Eglise a condamné l’action du mouvement tout en appelant les organisateurs de l’exposition à se mettre en conformité avec la loi. Plusieurs artistes notent que les auteurs de ce genre d’agression ont un sentiment d’impunité.

Partager :