Avec notre envoyé spécial à Varto, Jérôme Bastion
Le calme est revenu sur le bourg de Varto et ses 10 000 habitants perdus dans les hauts plateaux arides du Kurdistan, à l’est de l’Anatolie. Mais si la vie a repris son cours après deux nuits d’affrontements violents, les signes de ces accrochages restent visibles. Des vitrines brisées, des voitures mitraillées, des poubelles brûlées et des tranchées mal refermées témoignent de la situation insurrectionnelle qui a prévalu ici pendant presque une semaine, jusqu’à lundi matin.
Aujourd’hui, Varto compte ses morts, au nombre de quatre – deux militants armés du PKK et deux civils –, et ses disparus au nombre de trois. Les familles des victimes espèrent récupérer aujourd’hui les corps de Raudi, 36 ans, et Abdullah, 26 ans, et surtout en savoir plus sur les conditions de leur mort, eux qui n’étaient pas armés, mais dont tout le monde pense ici qu’ils ont été exécutés pour l’exemple.
Depuis le lendemain de l’élection présidentielle, expliquent les habitants de la région, les harcèlements de la police étaient incessants. Pressions, humiliations, interpellations sans raison, on fait monter la pression. Et quand lundi dernier une combattante kurde a été exhibée nue dans la rue après avoir été torturée, abattue et photographiée, les rebelles ont occupé, armés, le bourg en coupant l’accès aux véhicules de la police.
Comme à Silvan aujourd’hui, la reprise en main a été brutale. Le village enterre donc ses morts et répare les dégâts, mais personne ici ne croit à un retour à la normale durable alors que tout le Kurdistan s’embrase.