Avec notre envoyé spécial à Athènes, Romain Lemaresquier
Alexis Tsipras et son gouvernement continuent leur course de fond. Après la signature à l’arraché de l’accord, lundi matin, avec les créanciers de la Grèce -à l’issue d’une ultime nuit d’âpres négociations -, le texte ficelé avec les responsables européens doit maintenant obtenir le feu vert des parlementaires grecs. La longue journée de tractations à la Vouli, le Parlement grec, a déjà démarré, avec les sessions des commissions parlementaires, qui seront suivies, à partir de 19 heures à Athènes, de consultations des chefs de partis avec le Premier ministre.
Ce n’est qu’après cette phase de tractations en coulisse que la session plénière du Parlement se tiendra pour voter sur l’adoption, ou non, des nouvelles mesures d’austérité exigées par les créanciers en échange de la mise en place d'un troisième plan d'aide. Le vote devrait débuter aux alentours de minuit, ce mercredi soir.
Avec le centre, la droite et les socialistes
A priori, il y a peu de chance que ces mesures ne soient pas adoptées : le Premier ministre bénéficie du soutien de presque toute l’opposition, des conservateurs du parti Nouvelle démocratie aux centristes de To Potami, en passant par les socialistes du Pasok. Sur le plan politique, la grande inconnue est, pour l’instant, le nombre de députés de Syriza qui voteront contre le texte. Ils sont 149 à siéger à la Voulli, sur les 300 députés que compte le Parlement grec.
Depuis deux jours, le parti est au bord de l’implosion. Les déchirures se font de plus en plus patentes à mesure que les heures passent et qu’approche l’heure du vote sur un texte qu’Alexis Tsipras a lui-même expliqué avoir signé sans y croire. « J'assume mes responsabilités pour toute erreur que j'ai pu commettre. J'assume la responsabilité d'un texte auquel je ne crois pas mais que j'ai signé pour éviter un désastre au pays », a-t-il dit mardi soir à la télévision grecque.
Démission d'une ministre
Mercredi matin, la présidente du Parlement, Zoé Konstantopoulou, très opposée à ces réformes, et qui ne devrait pas présider la session plénière de ce soir, a appelé à voter contre ce projet de loi lors de l’ouverture des sessions des commissions parlementaires. La vice-ministre des Finances, Nadia Valavani, a pour sa part annoncé sa démission à la mi-journée. « Je ne vais pas voter en faveur de ce projet de loi et je crois qu'on ne peut pas rester au gouvernement si on vote contre », a-t-elle expliqué, jugeant que le plan « imposé » par les créanciers « n’est pas viable » pour le pays.
Sur son compte Facebook, Stathis Kouvelakis, membre du comité central de Syriza, a pour sa part annoncé que « 109 des 201 membres du comité central de Syriza » ont « rejeté l’accord ». Le texte « ne peut pas être accepté par les membres et les cadres de Syriza », peut-on lire dans la tribune publiée par Stathis Kouvelakis.
Pression sociale
Sur le plan social, également, le vote se fera sous haute tension. Plusieurs appels à manifester devant le Parlement ont été lancés. La grève générale décrétée dans le secteur public entraîne déjà de lourdes perturbations des transports publics.
Les enseignants, dont les principaux syndicats se sont joints à l’appel à la grève, ne sont pas en reste. « Bien qu'on ne connaisse pas encore avec précisions toutes les mesures qui sont dans cet accord, on sait qu'il est prévu une baisse des salaires, une baisse des pensions, une augmentation des cotisations sociales et un allongement de l'âge pour le départ à la retraite d'ici à 2022, [âge] qui passera à 67 ans, explique Nikoforos Konstandinou, syndicaliste enseignant. Par ailleurs on ne remplacera pas ceux qui partent. Bref, ces mesures changent totalement nos conditions de travail. » Outre les fonctionnaires, les pharmaciens ont également appelé à des manifestations ce mercredi.