Course contre la montre à Athènes, sous l'oeil de Bruxelles

L’accord signé lundi doit être présenté devant le Parlement grec ce mercredi. Pour obtenir sa validation rapide, exigence de l’Eurogroupe, le Premier ministre Alexis Tsipras est engagé dans des tractations politiques qui pourraient remettre en cause l’unité de la coalition au pouvoir en Grèce et l’avenir du gouvernement dans sa composition actuelle. Au sein de Syriza, les divisions sont vives

Avec notre correspondante et notre envoyé spécial à Athènes, Charlotte Stiévenard et Romain Lemaresquier, et notre bureau à Bruxelles,

La situation en Grèce est suivie de près à Bruxelles où l’expression la plus employée, ces dernières heures, est « reconstruire la confiance ». Et pour la Grèce, les occasions ne vont pas manquer dans les prochains jours, ni les prochaines semaines.

Avant même d’avoir commencé, les négociations pour le troisième plan d’aide à la Grèce s’annoncent en effet délicates. La zone euro demande à Athènes d’aller plus loin dans son programme de réformes. Autrement dit, elle veut des coupes budgétaires plus sévères, des privatisations plus importantes et une libéralisation du marché du travail plus ambitieuse. Les pays membres de la monnaie unique attendent dans l’immédiat que le Parlement grec adopte, d’ici mercredi, des réformes fiscales et une refonte du système de retraite.

Calendrier accéléré

Après l'accord signé lundi, l’heure est donc aux tractations politiques pour le gouvernement grec. Vendredi dernier, plusieurs députés de Syriza avaient déjà refusé de voter les propositions de réformes du gouvernement. Dès lundi, tard dans la soirée, les deux partis qui forment la coalition au pouvoir ont annoncé la tenue d’une réunion, pour ce mardi, afin étudier en détail les réformes que doit valider le Parlement grec d’ici à demain. Si Zoé Konstanto Pouloula, présidente du Parlement et opposée à l'accord, tentait encore lundi de freiner l’adoption des mesures d’austérité en inscrivant à l’agenda une session parlementaire sur les droits de l’homme, ce mardi matin, il n’en est plus question.

Alexis Tsipras va devoir accélérer les choses pour tenter de respecter le calendrier fixé lors du sommet de Bruxelles. Une manœuvre compliquée, mais indispensable pour obtenir le troisième plan d’aide, qui pourrait déboucher sur l’implosion de son parti et de son gouvernement.

Tensions sociales et politiques

Il y a urgence, car l’économie du pays n’est pas vraiment repartie : les banques resteront même fermées jusqu’à mercredi. C’est aussi mercredi que les syndicats du secteur public ont appelé à une grève nationale. Les fonctionnaires grecs, qui auraient dû percevoir la moitié de leur salaire le 13 juillet, n’ont toujours rien touché.

Dans la presse grecque, la question de l'avenir du gouvernement et de la gauche radicale domine largement les éditos. Et dans l'ensemble, les journaux grecs mettent en avant les difficultés qui s'annoncent pour le gouvernement d'Alexis Tsipras. Le Quotidien des rédacteurs titre « Vertige ». Pour ce journal classé plutôt à gauche, « tout va très vite ». Au lendemain de l'accord avec les créanciers, Le Qotuiden des rédacteurs estime que « la gauche radicale de Syriza est divisée entre opposants et partisans » et que « le gouvernement devra maintenant chercher des alliances ».

Réouverture des pourparlers à partir de vendredi

Un « exercice de calculs politiques », selon Ta Nea, quotidien proche des socialistes du Pasok. Voire un « champ de mines », pour le journal centriste Ethnos (La Nation), qui anticipe déjà le départ de ministres et de députés et « une refonte en profondeur du gouvernement ». Enfin, le journal conservateur Kathimerini préfère, lui, parler de « sables mouvants » et met Alexis Tsipras à sa Une. On y voit le Premier ministre grec de dos, un peu courbé, entrer dans le palais Maximos, la résidence officielle du Premier ministre. Et pour titre : « A l'heure de la responsabilité et des épreuves ».

Une fois l’accord validé par Athènes, ce sera au tour des Parlements de plusieurs Etats membres de donner leur feu-vert au lancement des négociations. L’ensemble de la procédure pourrait se clôturer vendredi et permettre à la zone euro et aux autorités grecques de se retrouver autour de la table pour engager alors des pourparlers sur le fond.

Et aux questions politiques et législatives s’ajoute l’urgence de la situation financière de la Grèce : le pays doit en effet rembourser 12 milliards d’euros d’ici à la mi-août. Il reste donc beaucoup de marches à gravir avant de conclure le nouveau plan de sauvetage, et à Bruxelles, tous les responsables ont voulu souligner l’ampleur de la tâche.

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