Pour affirmer la solidarité entre les 28 pays membres de l’Union européenne, la Commission propose la mise en place d’un mécanisme d’intervention d’urgence. Ce dispositif permettrait d’aider l’Italie et la Grèce. Le principe est de relocaliser 40 000 migrants arrivés dans les deux pays après le 15 avril ou qui débarqueront après la mise en place de ce dispositif. D’après la Commission, ce chiffre représente 40 % du nombre total de demandeurs d’asile dans les deux pays, soit 24 000 personnes en Italie et 16 000 en Grèce. Ce système, prévu pour deux ans, concernera principalement les réfugiés syriens et érythréens. Il pourra à l’avenir être activé par tout autre Etat membre qui fera face à un afflux soudain de migrants.
Une « solidarité minimale »
Cette « relocalisation » entre les 28 doit se faire en fonction d’une clef de répartition qui prend en compte pour chaque Etat le PIB (Produit intérieur brut), la population, le taux de chômage et le nombre de demandeurs d’asile et de réfugiés déjà sur place. Selon ces critères, l’Allemagne devrait ainsi accueillir 7 033 migrants et la France 6 752.
A cette proposition dite de « relocalisation » la Commission européenne ajoute une autre mesure. Elle propose la « réinstallation » 20 000 réfugiés, autrement dit de personnes situées hors de l’Europe et qui ont besoin d’une protection internationale selon le Haut Commissariat des Nations unies pour les réfugiés (HCR). Là encore, le programme est prévu pour deux ans et il bénéficiera d’une enveloppe de 50 millions d’euros.
Pour le Commissaire européen chargé de l’immigration, ces mesures doivent assurer une « solidarité minimale » au sein de l’Union européenne. Libre à chaque Etat d’aller au-delà des efforts demandés. Mais afin de rassurer les capitales, Dimitris Avramopoulos rappelle que ce système est temporaire et n’a pas vocation à être généralisé. Dans ce débat, le Commissaire souhaite d’ailleurs ne pas employer le mot de quotas et insister sur l’expression de « clef de répartition ».
Mais ce partage n’est pas sans contrepartie pour l’Italie et la Grèce. La Commission demande en retour un relevé systématique des empreintes digitales des demandeurs d’asile. Les deux pays sont souvent accusés de laxisme en la matière. Pour la Commission cette étape est donc doublement essentielle. Elle doit assurer l’efficacité d’un régime commun de l’asile en Europe. Mais elle a aussi pour but de convaincre les partenaires européens. C’est bien là que réside le nœud du problème. La Commission propose, le Parlement sera consulté pour avis. Mais la décision définitive reviendra aux Etats membres réunis au Conseil. Or les critiques n’ont pas manqué après les premières annonces de la Commission. Certaines capitales comme Londres, Budapest, Varsovie ou encore Prague n’ont pas caché leur hostilité. Si la France salue la démarche et le besoin d’une solidarité accrue, Paris affiche aussi une certaine réticence.
Agir contre les trafiquants
Ces nouvelles propositions sont à prendre en compte dans un cadre plus global pour répondre aux drames de l’immigration en Méditerranée. Avec ces mesures de « relocalisation » et de « réinstallation », la Commission apporte une réponse intérieure à ce défi. Mais l’Union veut aussi engager des actions tournées vers l’extérieur. Les 28 ont ainsi convenu de multiplier par trois les moyens et les capacités de l’opération Triton, coordonnée par Frontex, l’agence de surveillance des frontières extérieures de l’Union.
La Commission veut aussi agir contre les trafiquants. Elle aime répéter qu’il faut faire de ce trafic une activité à haut risque pour les criminels et moins rentable. La mesure phare du projet européen est l’arraisonnement et la destruction des navires employés par les réseaux criminels. Mais cette action nécessite l’accord de la communauté internationale qui n’est pas encore acquis.
Finalement, la Commission veut renforcer la coopération et le développement humanitaire avec les pays de départ et de transit. L’institution prévoit l’envoi d’officiers de liaison sur place. Des centres pourraient même être établis dans certains pays. Un établissement pilote devrait voir le jour au Niger d’ici la fin de l’année. Il aura pour mission d’informer les candidats à l’immigration des chances de réussite de leur voyage ou de fournir une assistance pour ceux qui accepteraient de retourner dans leur pays d’origine. Les négociations démarrent donc maintenant. La prochaine étape est prévue pour le 16 juin lors de la réunion des 28 ministres de l’Intérieur.