Avec notre correspondante à Athènes, Charlotte Stiévenard
Quelques noms circulaient déjà, comme celui de Yanis Varoufakis, économiste de Syriza âgé de 53 ans. Cet ancien conseiller du Premier ministre socialiste Georges Papandréou a fait quelques propositions dans une interview donnée à La Tribune une semaine plutôt, notamment sur la dette. Il a été nommé à la mi-journée au poste de ministre des Finances du pays.
L'économiste ne parle pas de coupes claires dedans, mais plutôt d'un remboursement calqué sur l'évolution du produit intérieur brut. Pro-européen, il défend depuis plusieurs années déjà le renforcement de la gouvernance de la zone euro pour affaiblir la position des Allemands.
Le ministère de la Marine pourrait échouer à Panos Kammenos, le leader des Grecs indépendants et partenaire de la coalition. En 2007, il avait déjà exercé un poste similaire sous le gouvernement de droite de Kostas Karamanlis.
Là où la répartition des postes s'annonce plus difficile, c'est au ministère de la Défense. Sur cette question, les positions diffèrent. Syriza serait plutôt favorable à une réduction de son budget, mais les Grecs indépendants risquent de ne pas être d'accord.
Le gouvernement devrait être resserré. A la veille des élections déjà, Alexis Tsipras parlait d'une dizaine de ministères au plus.
Un statut international à affirmer
La coalition formée par le Premier ministre grec Alexis Tsipras semble légitime au politologue Georges Kontoghiorghis. « Je ne trouve aucune contradiction entre Syriza qui se déclare à gauche et les Grecs indépendants qui se déclarent à droite. Sur le point principal qui est le mémorandum et la réforme de l’Etat, ils sont d’accord. La question est de savoir si en tant que partenaires au gouvernement, ils vont faire le nécessaire pour la Grèce. »
« La Grèce a des priorités qui ne passent pas par une distinction entre droite et gauche, estime-t-il. Il y a des priorités qui touchent l’existence de la Grèce actuellement. Son statut international, son économie, son statut aussi de partenariat dans l’Union européenne. Sur ce point-là, ils peuvent se retrouver sur un minimum de programme jusqu’à ce que se termine cette période d’attente. Et ensuite on verra. »
Chercher les futurs dirigeants dans la société
Quant à la capacité du gouvernement d'Alexis Tsipras d'assurer la gestion de la dette à travers la levée des impôts et le retour de la croissance, elle est liée à la réforme de l'Etat. Alexis Tsipras devra s'ouvrir à la société, croit savoir Georges Kontoghiorghis.
« La question n’est pas relative aux cadres de Tsipras, mais plutôt à ceux que Tsipras en tant que Premier ministre va inviter pour travailler dans le sens d’une réforme de l’Etat. S’il choisit de former un gouvernement et des équipes pour la direction de l’Etat qui proviennent de son parti, de ses confiances personnelles, alors il est plus que sûr que Tsipras va échouer parce qu’il faut une ouverture vers la société. »
Pour le politologue, le nouveau gouvernement grec doit faire preuve de cette ouverture pour être crédible : « Si le parti de Tsipras n’a pas de cadres qui sont doués pour cette grande politique, il faut les chercher dans la société. La société grecque a des cadres qui font des carrières internationales. Il ne s’agit pas de les chercher dans les poubelles de la partitocratie. Il faut s’ouvrir à la société. »
■ Les doutes quant à la réussite du gouvernement d'Alexis Tsipras
Un peu partout à Athènes, beaucoup de ceux qui ont voté pour Syriza, ont malgré tout des doutes sur la capacité du parti d’Alexis Tsipras d’honorer les promissions faites pendant la campagne. Les 35,6% des voix en faveur du parti et la majorité absolue obtenue grâce à la coalition avec les Grecs indépendants ne rassurent pas tous les électeurs et les politiques, rapportenotre envoyé spécial à Athènes, Toudor Tépénéag.
Rétablir l'alimentation en électricité pour ceux qui en ont été privés, faciliter l’accès aux soins, s’attaquer au chômage, augmenter le salaire minimum après les coupes de ces dernières années, ce sont là des éléments concrets de la lutte contre l’austérité que les Grecs attendent impatiemment.
Mais vu les positions idéologiques du parti Syriza, certains comme le président de la Commission des marchés financiers, Kostas Botopoulos, se demandent comment le gouvernement va financer sa politique sociale : « Le discours de Syriza est assez ambivalent. Qu’est-ce qu’ils vont faire et est-ce qu’ils vont respecter les privatisations déjà faites ? Il y a des voix pas très minoritaires dans le parti qui veulent même revenir sur les privatisations déjà faites, ce qui vraiment amènerait à un manque à gagner économique au vu du fait que la Grèce a vraiment besoin de capitaux pour relancer sa marche en avant. »
Entre les problèmes auxquels sont confrontés les gens et l’approche macroéconomique, ce sont deux visions politiques qui s’opposent. Le gouvernement d’Alexis Tsipras devra essayer de résoudre cette équation difficile.