L'arrivée du convoi humanitaire russe à Lougansk provoque un tollé

Le convoi humanitaire russe est entré, vendredi soir 22 août, sans l’accord de l’Ukraine, à Lougansk. Pour les autorités ukrainiennes, il s'agit d'une « invasion », pour l'Union européenne d'une « claire violation des frontières ». Barack Obama et la chancelière allemande Angela Merkel ont estimé vendredi lors d'un entretien téléphonique que la Russie s'était engagée dans une « dangereuse escalade ». A Moscou, on estime avoir agi en conformité avec le droit international humanitaire. Le Conseil de sécurité s'est réuni vendredi soir.

Tous les camions du convoi humanitaire russe ont atteint Lougansk, ont annoncé en début de soirée les médias russes, nous rapporte notre correspondante à Moscou, Murielle Pomponne. Les télés ont montré les images des premiers déchargements de ce qui ressemble à des sacs de céréales. L'agence Interfax précise qu'il s'agit de 262 camions transportant 2 000 tonnes d'aides alimentaires, d'eau et de médicaments.

Pour le ministère des Affaires étrangères, la Russie a agi en conformité avec le droit international humanitaire. Lors de la réunion du Conseil de sécurité des Nations unies vendredi soir, à huis clos, à l'initiative de la Lituanie, Moscou a de nouveau défendu son intervention au nom de la situation humanitaire. La diplomatie russe s'est montrée particulièrement agressive à l'égard de la Lituanie dont le ministre des Affaires étrangères était vendredi à Kiev. Vilnius est accusé par Moscou de « torpiller toutes les initiatives constructives et productives » russes avec l'appui des Etats-Unis.

Lors d'une conversation téléphonique avec la chancelière allemande, le président Poutine a indiqué que « face aux obstacles dressés par Kiev à la distribution de cette aide, et compte tenu de l'urgence de la situation, il n'était plus possible d'attendre pour envoyer le convoi à Lougansk ».

Pour Moscou, les atermoiements de Kiev s'expliquaient par la volonté des autorités de lancer une offensive sur Lougansk et Donetsk avant le 24 août, date anniversaire de l'indépendance du pays. Angela Merkel est d'ailleurs ce samedi à Kiev où elle sera reçue par le président ukrainien Porochenko.

Le porte-parole du président russe indique également que les administrations présidentielles russes et ukrainiennes ont été en contact téléphonique dans l'après-midi et ont convenu d'éviter tout incident et provocation lors de la distribution de l'aide humanitaire russe. Les président Poutine et Poroshenko devraient normalement se rencontrer mardi prochain à Minsk lors d'un sommet de la CEI.

« Une violation de la souveraineté »

L'arrivée des camions russes dans l'un des bastions des séparatistes de la région a suscité de nombreuses réactions vendredi en fin de journée. A Washington, le Pentagone a exigé de la Russie qu'elle retire « immédiatement » le convoi humanitaire qui a atteint Lougansk, et a évoqué de nouvelles sanctions contre Moscou. L'envoi de ces camions constitue une « violation de la souveraineté et de l'intégrité territoriale de l'Ukraine par la Russie », a martelé le contre-amiral John Kirby, porte-parole du ministère américain de la Défense.

Pour le secrétaire général de l'Otan, Anders Fogh Rasmussen, l’entrée de ce « soi-disant » convoi humanitaire ne va qu’aggraver la crise dans la région, rapporte notre bureau de Bruxelles. Le fait que ces camions aient traversé la frontière ukrainienne sans l’accord des autorités de Kiev et sans escorte de la Croix-Rouge démontre clairement que la Russie cherche davantage à réapprovisionner les séparatistes pro-russes qu’à aider les populations locales, ajoute le commandant suprême des forces alliées en Europe, le général Philip Breedlove.

Pas de nouvelles sanctions européennes prévues

De son côté, l'Union européenne a « déploré » la décision de Moscou de faire entrer en Ukraine les camions d'aide humanitaire. La chef de la diplomatie européenne Catherine Ashton condamne « une claire violation de la frontière ukrainienne ». Un message qu’elle répètera à Minsk, mardi prochain, lors d’une rencontre avec les autorités russes et les autorités de Kiev.

L’Union européenne ne devrait pas aller au-delà des mots du moins pour le moment. Les Européens ont du mal à digérer les mesures de rétorsion prises par Moscou sur les produits alimentaires en provenance des Vingt-Huit. Un embargo qui pourrait coûter à l’Union quelque 7 milliards d’euros, selon l’institution financière ING.

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