Turquie: la négociation avec la rébellion kurde est-elle enterrée?

Après les tirs à balles réelles de l'armée sur des civils, qui ont fait deux morts samedi dernier, les manifestations se multiplient un peu partout en Turquie, faisant des blessés graves et un nouveau mort. Les manifestations de soutien aux victimes de Lice à Istanbul, Ankara et dans le sud-est kurde se déroulent conjointement à des actes de provocation isolés contre des Kurdes et des rassemblements nationalistes pour défendre le drapeau national.

Avec notre correspondant à Istanbul, Jérôme Bastion

Après les deux morts de Lice, le PKK a appelé publiquement les jeunes Kurdes à rejoindre le maquis. C'est une première. De sa prison, Abdullah Öcalan, qui a été autorisé dans l'urgence à recevoir lundi une délégation de politiciens kurdes - c'est aussi une première -, a fait savoir que, pour lui, les négociations telles qu'elles se déroulaient jusqu'à présent n'étaient plus d'actualité.

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C’est une indication claire que le processus est bloqué, voire arrivé à son terme sur un constat d'échec. Cela fait plusieurs semaines qu'Abdullah Öcalan réclame un nouveau cadre pour ces négociations, prévenant que les sentiers de la guerre étaient à nouveau en vue. Cela fait aussi des semaines que la population proteste contre la construction de postes militaires et de fortins dans le sud-est kurde, des bâtiments dont la présence, signe indubitable d'un renforcement militaire, mine le processus de résolution de la question kurde.

Les jeunes Kurdes prennent le maquis

Les Kurdes n'ont pas été entendus par le gouvernement, et la reprise des affrontements armés, annoncée depuis près d’un mois par des actions limitées de la rébellion, est plus proche que jamais. Le sit-in des quinze mères de Diyarbakir qui réclament qu'on leur « rende » leurs enfants soi-disant enlevés par la rébellion, qui dure depuis près de trois semaines et s’est transformé en grève de la faim lundi, est révélateur de la tension qui monte dans le Sud-est et des préparatifs militaires en cours. Les jeunes gens n'ont pas été « enlevés ». Ils sont tout simplement partis, de leur plein gré, rejoindre le maquis. Là- encore, c'est la première fois depuis fort longtemps, d'où la surprise de leurs proches, ce qui est, également, révélateur.

S'adressant ce mardi matin aux membres de son groupe parlementaire, le Premier ministre turque ne se départit pas de son habituel discours menaçant, évoquant les « terroristes » et sa patience qui est « à bout ». A-t-il encore les moyens et l'envie de poursuivre les négociations de paix avec le PKK ?

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