Turquie: un nouveau scandale, des élections, et un avenir incertain

Escalade dans le muselage des libertés en Turquie : le gouvernement bloque désormais le site internet de vidéos YouTube, une semaine après le réseau social Twitter. En cause, selon les autorités, des raisons de « sécurité nationale ». Cette décision intervient à l'approche des élections municipales ce dimanche. Le scrutin est capital pour le Premier ministre Recep Tayyip Erdogan, au cœur d'une série de scandales ces derniers temps.

Avec notre correspondant à Istanbul, Jérôme Bastion

Y a-t-il encore un pilote dans l’avion ? C’est la question que se pose désormais une bonne partie de la population, tant le gouvernement semble s'affaiblir et perdre le contrôle de la situation. Plus que la fermeture de YouTube, qui était attendue, et qui devrait être suivie par la fermeture de Facebook, ce qui inquiète l’opinion publique, c’est l’ampleur que prend le bras de fer entre le gouvernement et son (ou ses) ennemi(s).

Ce qui inquiète n’est pas tant la gravité du contenu de la discussion dont l’enregistrement a été publié hier - où il est tout de même question d’une provocation des services secrets pour créer le prétexte à intervenir militairement en Syrie ! - mais le fait qu’une réunion d’une telle importance soit si facilement espionnée et son contenu étalé sur la place publique. Autrement dit, c’est la sécurité de l’Etat.

La presse commente en des termes très crus cet aspect précis de ce nouveau scandale, et exprime des craintes que l’on retrouve dans la population. Tous les scénarios sont désormais ouvertement évoqués ; à se demander même parfois si le scrutin de dimanche aura lieu comme prévu.

La confrérie Gülen de nouveau accusée

Beaucoup de questions se posent quant à l’après-élections : que se passera-t-il si l’AKP, qui ne semble plus en mesure de gouverner, reste au pouvoir ? A l'inverse, quelle sera l'alternative si le Parti de la justice et du développement perd, alors qu’il n’y a pas de parti fort pour une éventuelle relève ?

 

Pour le chef du gouvernement, il ne fait aucun doute que la confrérie Gülen est derrière ce nouveau scandale d’écoutes. Lors de son discours de meeting électoral hier, le Premier ministre a dénoncé « l’individu qui réside en Pennsylvanie », c’est-à-dire Fethullah Gülen qui vit en exil aux Etats-Unis. Il a promis d’aller pourchasser jusqu’au fond de leur tanière ses adeptes, ennemis supposés du parti de gouvernement. Une enquête a été ouverte pour espionnage et trahison. On verra bien si l’auteur de ces écoutes parvient à être identifié.

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