Avec notre bureau à Bruxelles et notre correspondant aux Nations unies
L'Ukraine, invité de dernière minute de ce sommet, va accaparer les débats de la journée, dont l'ordre du jour a été bouleversé. Le seul sujet qui va rester, c’est la question sur la réduction de la dépendance énergétique de l’Union européenne.
Un tiers du gaz consommé en Europe vient de Russie et la réflexion va bon train sur les moyens de réduire cette dépendance. Parmi les plus concernés figurent la Roumanie, la Bulgarie et la Finlande, mais aussi l’Allemagne.
Cet état de fait devrait d’ailleurs avoir un impact important sur le débat, au sujet des sanctions supplémentaires que les Européens pourraient imposer, après celles prises lundi. Les 28 avaient affirmé qu’ils pourraient aller jusqu’à des sanctions économiques, ce que les pays du nord de l’Europe appellent de leurs vœux. Mais les Européens sont encore divisés sur cette question.
Mesures de rétorsion symboliques
Angela Merkel a menacé la Russie de sanctions économiques si la situation sur place devait se détériorer. Avant de partir à Bruxelles pour le sommet européen, la chancelière a répété devant le Parlement allemand que le référendum en Crimée était illégal et soulignait l’isolement de Moscou sur la scène internationale.
Angela Merkel a annoncé que le sommet de Bruxelles allait élargir la liste des 21 personnes frappées par des interdictions de voyager et le gel de leurs avoirs. Quant au G8, la réunion des pays les plus industrialisés incluant la Russie, la chancelière a estimé qu’il « n’existait plus tant que le contexte politique n’était pas réuni pour lui permettre de se rencontrer ». Angela Merkel a également évoqué une possible annulation des consultations régulières entre la Russie et l’Allemagne qui doivent se tenir normalement fin avril.
Angela Merkel veut cependant toujours croire à une avancée diplomatique. La chancelière espère qu’une mission « forte » de l’organisation pour la sécurité et la coopération en Europe pourra se déployer le plus rapidement possible en Ukraine tout en soulignant que les négociations s’avéraient difficiles.
En fait, on s’attend surtout à des mesures plus symboliques, mais qui pourraient provoquer la colère du Kremlin, comme l’annulation du sommet UE-Russie de juin à Sotchi, et la signature du volet politique du fameux accord d’association avec l’Ukraine.
Ton martial
L’option militaire n’est pas envisagée pour l’instant, même si les déclarations du secrétaire général de l’Otan, hier, ont pu jeter le doute. Anders Fogh Rasmussen parle d’une agression militaire russe, de la plus grave menace depuis la fin de la guerre froide.
Ces propos n’auraient pas détonné dans la bouche d’un secrétaire général de l’Otan, il y a trente ou quarante ans. Mais depuis un quart de siècle l’Alliance nord-atlantique n’avait plus utilisé un ton aussi martial envers la Russie.
Pour les Européens, il est évident qu’il n’y aura pas d’intervention militaire, ce que les Etats-Unis ont eux-mêmes exclu de leur côté, même si le vice-président des Etats-Unis a évoqué en Pologne, la possibilité d’activer la clause de défense mutuelle de l’Alliance atlantique en cas de besoin.
Vifs échanges aux Nations unies
A l'ONU, les échanges ont de nouveau été très vifs sur l’Ukraine. Devant le Conseil de sécurité, la représentante américaine compare la Russie à un « voleur » et promet de durcir les sanctions de son pays.
L’ambassadeur russe exige des excuses et martèle : « Le peuple de Crimée a fait son choix. Ce choix doit être respecté. » Le rapporteur des droits de l'homme Ivan Simonovic assure qu’il n’a pas noté de harcèlement systématique des russophones en Ukraine.
En coulisses, les diplomates avouent leur désarroi face à ce fait accompli. Paris, Londres et Washington veulent en appeler à l’assemblée générale de l’ONU pour isoler encore davantage Moscou, sans doute la semaine prochaine. Ban Ki-moon est en déplacement ce jeudi à Moscou et ce vendredi à Kiev. Le secrétaire général de l’ONU se refuse toujours à dire si cette annexion viole ou non la charte des Nations unies. Il s'est pour l'instant déclaré « profondément préoccupé » par la situation en Ukraine lors d'un entretien avec le président russe Vladimir Poutine, jeudi à Moscou.
Le sentiment général à l’ONU est que le sort de la Crimée est joué et les diplomates essayent de faire en sorte que la Russie s’arrête à la Crimée et n’aille pas plus loin dans le démantèlement de l'Ukraine.