Ukraine: à Londres, Lavrov et Kerry se quittent sur un échec

Deux jours avant le référendum sur le rattachement de la Crimée à la Russie, une réunion de la dernière chance s'est tenue à Londres ce vendredi 14 mars, entre le ministre russe des Affaires étrangères, Sergueï Lavrov, et son homologue américain John Kerry. L'issue est un échec. Le référendum est donc maintenu. Et en Crimée, les séparatistes sont optimistes et poussent même d'autres régions à suivre l'exemple.

Sergueï Lavrov, a estimé vendredi à Londres que les Etats-Unis et son pays n'avaient pas de « vision commune » sur la situation en Ukraine, ajoutant que Moscou allait « respecter le souhait des habitants de la Crimée » lors du référendum de dimanche.

« Nous n'avons pas de vision commune » sur l'Ukraine, même si « le dialogue a été vraiment constructif », a déclaré Le ministre russe des Affaires étrangères, Sergueï Lavrov, lors d'une conférence de presse organisée après un entretien de plusieurs heures avec son homologue américain John Kerry.

Il a aussi prévenu que Moscou allait respecter « le souhait des habitants de la Crimée », appelés à se prononcer dimanche lors d'un référendum sur le rattachement de la péninsule ukrainienne à la Russie.

Moscou n'a « pas le projet d'envahir le sud-est de l'Ukraine », a ajouté Segueï Lavrov minimisant la portée des menaces voilées d'intervention formulées quelques heures plus tôt par son ministère à Moscou après de violents incidents à Donetsk.

La stratégie Kerry mise à mal

De son côté, le secrétaire d'Etat américain s'est livré à un véritable numéro d'équilibriste. John Kerry a voulu faire preuve de la détermination de Washington et de la communauté internationale de préserver l'intégrité territoriale de l'Ukraine, tout en laissant au président russe la possibilité de sortir de la crise actuelle la tête haute. Le secrétaire d'Etat s'en est expliqué à l'issu de la réunion devant les journalistes.

Point un de la stratégie de John Kerry face à Sergeï Lavrov: témoigner du respect au camp advers : « Il est important de souligner que nous reconnaissons les intérêts légitimes de la Russie en Ukraine. Les intérêts historiques, culturels et stratégiques... Nous comprenons ces intérêts et sommes prêts à les respecter. »

Ensuite, l'Américain a soumis à Moscou un plan alternatif pour sortir de la crise actuelle. Concernant le déploiement militaire russe en Crimée et le long de la frontière avec l'Ukraine, John Kerry a entre autre proposé : « Le retrait de toutes les troupes et le gèle de leur redéploiement, le temps que la diplomate fasse son travail. »

Alors que Vladimir Poutine ne veut pas prendre de décision sur la Crimée avant la tenue du référendum de dimanche, John Kerry a assuré qu'il espérait toujours la mise en oeuvre d'une solution diplomatique, tout en prévenant qu'il y aurait « des conséquences » pour la Russie si cette voie venait à échoue :

« Nous espérons que le président Poutine ne considère pas notre position comme une menace, ni comme une attaque personnelle. Nous demandons juste le respect des cadres internationaux et multilatéraux que nous avons mis en place depuis la deuxième guerre mondiale. »

Et John Kerry de conclure : « Mais de fait nous ne savons pas ce que Vladimir Poutine décidera. »

« Tout sera réglé d'ici an »

Pendant ce temps, à Simféropol, capitale de la péninsule de Crimée, notre envoyé spécial Daniel Vallot a suivi la conférence de presse du leader séparatiste ukrainien Sergueï Axionov. L'homme fort de la péninsule, a affirmé ce vendredi après-midi devant la presse que pour lui, la victoire du «oui» dimanche ne fait aucun doute.

Sergueï Axionov a affiché une confiance absolue dans le résultat qu’aura dimanche le référendum. Costume impeccable, très sûr de lui, le dirigeant séparatiste a confirmé qu’il n’y aurait pas de seuil de participation pour que le résultat du vote soit validé, ce qui ouvre la voie à une victoire certaine, tous les adversaires du rattachement à la Russie ayant, en effet, appelé à boycotter le scrutin.

Interrogé sur la mise en place effective du rattachement à la Russie, Sergueï Axionov s’est voulu tout aussi confiant. « Tout sera réglé dans un délai d’un an maximum », a-t-il déclaré. Il a également voulu rassurer les habitants de Crimée sur les conséquences matérielles du processus en cours. « Tous les salaires seront payés, toutes les retraites seront payées, a-t-il dit, il n’y aura aucun problème d’approvisionnement. »

Il faut savoir que toutes les infrastructures de la Crimée étant tournées vers l’Ukraine, une sécession pourrait poser des problèmes majeurs sur le territoire notamment pour l’eau, l’énergie et le système bancaire, ce qui inquiète évidemment les habitants de Crimée.

Sergueï Axionov s’est par ailleurs dit favorable à l’idée de référendum séparatiste dans d’autres régions d’Ukraine. Interrogé sur le risque d’éclatement du pays, le dirigeant a répondu : « Si dans d’autres régions un nombre suffisant de personnes soutiennent le projet de rattachement à la Russie, alors ils devraient suivre notre exemple et organiser à leur tour des référendums. »

Enfin, Vladimir Poutine s'est également exprimé sur la situation. Le référendum organisé dimanche en Crimée est absolument conforme au droit international et à la charte des Nations unies, a affirmé le chef du Kremlin. Le président russe l’a dit au téléphone à Ban Ki-moon, le secrétaire général de l’ONU.

Sur le terrain, les Russes ne semblent guère impressionnés. Un navire de guerre russe a débarqué des camions, des soldats et au moins un véhicule blindé de transport de troupes (VTT) près de Sébastopol.

Partager :