Ukraine: ballet diplomatique perturbé entre Kiev et Bruxelles

Grande confusion en Ukraine. Alors que le dialogue politique -avec l'appel du président Ianoukovitch à la trêve- et la diplomatie -avec la visite de diplomates de haut rang à Kiev-, semblaient pouvoir reprendre leur droit, la capitale ukrainienne s'est réveillée ce matin avec une nouvelle explosion de violences. Plusieurs rencontres ont eu lieu dans la matinée avant la réunion à Bruxelles dans l'après-midi.

La réunion entre le président Ianoukovitch et les ministres français, allemand et polonais des Affaires étrangères, d'abord annoncée comme étant annulée « pour des raisons de sécurité » se tiendrait finalement, selon la présidence ukrainienne. 

Un ballet diplomatique s'est engagé tôt ce jeudi matin. Côté russe, Moscou a dépêché son vice-Premier ministre, ancien ambassadeur à l’Otan, Dmitri Rogozine, connu pour ses positions nationalistes. Sa mission : tenter de convaincre l'opposition ukrainienne, de « coopérer avec les autorités ».

Côté européen, les chefs de la diplomatie française, allemande et polonaise avaient rendez-vous ce jeudi tôt à l’ambassade d’Allemagne à Kiev, où ils rencontraient les leaders de l’opposition.

Rencontre avec l'opposition

A l’issue de la rencontre avec les trois ministres, l’un des leaders de l’opposition ukrainienne, Arseni Iatseniouk a expliqué que la conversation concernait les possibles solutions du conflit. De l’avis de l’opposition, dans l’immédiat, la seule solution crédible consisterait à retirer les forces de police de la place de l’Indépendance et de créer une « zone démilitarisée » à ses abords.

Ainsi, il reviendrait au gouvernement de contrôler les forces de l’ordre, et à l’opposition – de contrôler la place. Après leur entretien avec l’opposition, Laurent Fabius, Radoslaw Sikorski et Frank-Walter Steinmeier se sont rendus à la rencontre prévue avec le président Ianoukovitch. Un rendez-vous rendu difficile par les scènes de combat dans le centre-ville.

Finalement, l’entretien n’a pas eu lieu au siège de la présidence, mais à un autre endroit, qui n’a pas été revélé pour l’instant. Le contenu de la conversation n’est pas encore connu, les quatre hommes restant toujours enfermés dans le cabinet du président depuis presque quatre heures, sans leurs conseillers.

Selon des membres de leur entourage, la durée de la rencontre serait plutôt un bon signe, ou en tout cas témoignerait d’une volonté de négocier de la part de Viktor Ianoukovitch. Il sait que ses interlocuteurs se rendent directement de Kiev à Bruxelles, où ils doivent discuter avec tous leurs homologues européens d’éventuelles sanctions personnelles contre les dirigeants ukrainiens.

Trouver une unanimité

Le Conseil extraordinaire des ministres européens des Affaires étrangères consacré à l'Ukraine était prévu à 15h et il devrait y être question des sanctions à l’égard de ses dirigeants.

Le problème sera pour les Européens de trouver un consensus, explique notre bureau de Bruxelles, notamment sur la question éventuelle de sanctions. Il ne peut y avoir de sanction que si les 28 sont tous d’accord sur ce point.

Pour l’instant, trois pays ont réellement appelé formellement à des sanctions, tous d’ailleurs en lien avec la France, puisque c’est d’abord par un communiqué franco-polonais hier matin que le terme a été posé, puis à l’issue de la réunion entre François Hollande et Angela Merkel lors de la conférence de presse franco-allemande.

France, Allemagne et Pologne, trois pays donc et en face des pays qui sont formellement opposés à ces sanctions comme la Bulgarie, Chypre, la Grèce ou encore l’Espagne. La Roumanie, qui était pour l’instant plutôt opposée, a décidé hier mercredi de se rallier au camp des pays qui veulent des sanctions.

Trois types de sanctions

Il y aurait à priori trois types de sanction : gel des avoirs en Europe, interdiction de visa pour l’entrée dans l’Union européenne, et puis l’interdiction d’exportation d’armement qui pourrait être utilisé à des fins répressives, et cela viserait les responsables directs de la répression.

Il se peut d'ailleurs que le président ukrainien, Viktor Ianoukovitch, ne soit pas directement sur la liste des personnalités ukrainiennes responsables des violences.

Cette option serait utilisée afin de permettre de garder ouvertes les possibilités de dialogue. C’est aussi un argument des opposants aux sanctions, qui estiment qu’elles ne seraient pas forcément efficaces et ils donnent en contre-exemple les sanctions imposées à la Biélorussie qui n'ont fait finalement que rapprocher la Biélorussie de la Russie.

Les nouvelles violences de la matinée pourraient rebalayer les cartes.

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