Une explosion dans un trolleybus a fait au moins quatorze victimes et 41 blessés, ce lundi 30 décembre à 4h20 (TU) à Volgograd, dans le sud-ouest de la Russie. « Une enquête a été ouverte pour attentat terroriste et trafic d'armes », a annoncé Vladimir Markine, porte-parole du comité d’enquête, l’organisme en charge des principales enquêtes en Russie.
Le bilan, qui était de dix personnes tuées et d'autant de personnes blessées en début de matinée, a été revu à la hausse par le ministère russe de la Santé, qui évoque désormais quatorze personnes tuées et 41 blessés, dont 27 hospitalisés. Les médecins s’efforcent de préserver la santé et la vie de nombreux blessés, notamment de ceux dont l’état est qualifié de « critique ».
Parmi les blessés dont le pronostic vital est engagé, deux adultes et un tout petit enfant - dont l'âge est estimé à environ huit mois - plongé dans un coma profond. Pour l’opinion publique russe, l’histoire de cet enfant est particulièrement bouleversante. Il est pour l’instant impossible d’établir son identité. Ses parents ont sans doute péri dans l’attentat. Deux adolescents de seize ans ont également été blessés dans l’attentat. Leur état est qualifié de « grave, mais stable ».
Veronika Dorman, notre correspondante de RFI en Russie, rapporte que le trolleybus a été complètement détruit par la puissance de l'explosion. Selon des témoins, l'explosion a été telle que les vitres des immeubles voisins ont volé en éclats.
Les enquêteurs assurent que l'attentat a été commis par un kamikaze, et que des éléments permettent de relier l'attentat de ce lundi matin à celui survenu la veille, dimanche. Les deux kamikazes auraient utilisé des explosifs identiques, qui auraient pu être fabriqués au même endroit. Le lieu et l’heure n’auraient pas été choisis au hasard, car la ligne du trolleybus visée est très fréquentée à cette période, notamment par des étudiants.
Sécurité renforcée dans tout le pays
Après l’attentat d’hier, un niveau d’alerte anti-terroriste a été mis en place dans toute la région de Volgograd. Les mesures de sécurité ont été renforcées dans les principaux aéroports et les grandes gares du pays. Ce lundi, le président Vladimir Poutine a donné l’ordre d’intensifier encore toutes ces mesures, il a également dépêché à Volgograd le directeur des services secrets, Alexandre Bortnikov. De son côté, le comité anti-terroriste russe a demandé aux habitants de Volgograd de ne pas sortir de chez eux sans une pièce d’identité.
Le spectre des « veuves noires »
Dimanche, un attentat-suicide avait déjà fait 17 morts dans cette ville, située non loin du Caucase, une région instable du sud-ouest de la Russie. Selon les premiers éléments de l’enquête menée par les services fédéraux russes, relayés par des médias russes, le kamikaze qui s’est fait exploser dimanche est une femme originaire du Daguestan, dans le Caucase russe. Oksana Aslanova, dont le nom a été dévoilé par la presse russe, aurait été mariée deux fois à des rebelles islamistes tués par les forces fédérales russes.
→ A (RE)LIRE : Russie: une «veuve noire» responsable de l'attentat de Volgograd
En octobre dernier, une jeune femme s’était déjà fait exploser dans un bus à Volgograd, faisant alors 6 morts et plusieurs blessés.
Cette recrudescence d’attentats fait ressurgir la crainte des « veuves noires » et intervient à quelques semaines des Jeux olympiques qui doivent se tenir à Sotchi, en février prochain. En Russie, les femmes kamikazes, les « veuves noires », en général des épouses ou des sœurs de rebelles islamistes morts au combat, sont devenues l’arme de prédilection des islamistes du Caucase du Nord pour exporter vers les grandes villes du reste de la Russie la violence qui fait partie du quotidien dans cette région.
Ce sont ainsi des femmes qui ont commis les derniers attentats meurtriers à Moscou, notamment à l’aéroport de Domodedovo en 2011, qui avait fait 35 morts, ainsi que le double attentat dans le métro moscovite, qui avait fait 40 morts en 2010.
Dokou Oumarov, le chef rebelle qui entend établir un Etat islamiste dans le Caucase et avait revendiqué ces deux attentats, a appelé dans une vidéo publiée en juillet dernier à des attaques visant à empêcher « par tous les moyens » la tenue des JO de Sotchi.
■ ANALYSE : Pourquoi Volgograd ?
Cité située près des Républiques du Nord-Caucase dont le Daguestan, le chef de la rébellion islamiste avait appelé dès juillet à empêcher les Jeux olympiques de Sotchi par tous les moyens. Ce double attentat dans une grande ville, qui n'est pas très éloignée du site, sonne comme un avertissement.
Explications avec Guennadi Goudkov, ex-vice président du Comité de la sécurité de la Douma et ancien officier des services secrets russes à Volgograd :
« Je crois que les organisations clandestines terroristes agissent suivant le principe selon lequel " on agit là où c’est possible ". Si elles avaient la possibilité de faire des attentats à Moscou, à Saint-Pétersbourg ou dans une autre ville, elles l’auraient fait. Je crois qu’à Volgograd, les terroristes disposent d’un réseau, d’un nombre suffisant de combattants et de canaux de transport permettant de faire venir une bombe vivante sur place... Volgograd est une ville dont le nom est très symbolique. C’est une ville dont l’histoire militaire a été glorieuse, une ville d’un million d’habitants environ. Et de fait, l’acte criminel a pu faire parler de lui dans tout le territoire russe. »