Turquie: le fils d’Erdogan visé par l’enquête anticorruption

Au lendemain du remaniement ministériel en Turquie, un appel à la manifestation sur la place Taksim a été lancé pour ce vendredi soir. La vaste enquête anticorruption lancée il y a 15 jours s’étend maintenant jusqu’au fils du Premier ministre Recep Tayyip Erdogan, soupçonné de « constitution et appartenance à une organisation criminelle à but lucratif » selon la presse turque. Le procureur en charge de l’instruction dit avoir été dessaisi de l’enquête.

Avec notre correspondant à Istanbul, Jérôme Bastion

Le dessaisissement du procureur en charge de l’instruction dans la vaste opération anticorruption en cours en Turquie est la conséquence d’une toute nouvelle directive. Celle-ci impose désormais aux procureurs et aux juges, mais aussi aux policiers, d’informer leur hiérarchie dès qu’une enquête visant des personnalités est ouverte. Une mesure qui, évidemment, indigne aussi bien les professionnels de la justice, l'opposition et jusqu’à certains députés du parti au pouvoir.

Le procureur affirme avoir été empêché de continuer l'enquête

Depuis mercredi soir, la rumeur annonçait de nouvelles poursuites à l’encontre d’une trentaine politiciens et de leurs proches. Seulement, vingt-quatre heures plus tard, toujours rien.

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Le procureur de la République d’Istanbul, Muammer Akkas, a fini par jeter un pavé dans la mare : il a été empêché de poursuivre son enquête et de procéder aux perquisitions et arrestations prévues, a-t-il déclaré à la presse turque. Et cette procédure visait notamment le fils du Premier ministre, Bilal Erdogan. Le plus âgé des deux fils de M. Erdogan est un homme d’affaires, il possède notamment une entreprise de transport maritime et dirige l’ONG la Fondation turque pour le service des jeunes et de l’éducation. Il est soupçonné de graves irrégularités.

Jusqu'où peut aller Erdogan pour bloquer l'enquête ?

Mais si le dossier a bien été retiré au procureur Muammer Akkas, le fils de Recep Tayyip Erdogan demeure suspecté dans cette affaire. Il reste juste à trouver et à désigner un courageux procureur. Plusieurs questions restent en suspens : jusqu'où est prêt à aller le chef du gouvernement pour empêcher que l'enquête aille à son terme ? Et jusqu'à quand pourra-t-il s'y opposer ?

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Le contexte turc se fait de plus en plus électrique. Les manifestations se multiplient depuis quelque temps. Jeudi soir, des rassemblements ont eu lieu à Adana, Istanbul, Ankara, Izmir, Bursa, Eskisehir, Sakarya, Tunceli, Antalya, Mersin et Samsun. Mercredi soir, déjà, une dizaine de grandes villes avait été le théâtre de manifestations à l’initiative d’organisations de gauche. Ces manifestations ont rassemblé chaque fois quelques centaines de personnes, scandant des slogans tels que : « Au voleur » ; « Voleurs de père en fils » ou « gouvernement : démission ». Mais c’est surtout ce vendredi soir que l’on pourra vraiment mesurer l'ampleur de la contestation : un grand rassemblement est organisé sur la place Taksim, à Istanbul.

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