Ukraine: dans les rues de Kiev, les manifestants défilent et les rumeurs courent

L’opposition prépare une nouvelle manifestation massive dans le centre de Kiev ce dimanche 8 décembre. Des milliers de personnes continuent d’occuper la place de l’Indépendance jour et nuit. Les manifestants s’inquiètent du fait que le président Ianoukovitch, qui n’a pas signé d’accord avec l’Union européenne, puisse préparer l’adhésion de son pays à l'Union douanière menée par la Russie.

Avec notre envoyée spéciale à Kiev, Anastasia Becchio

L'inquiétude est montée d'un cran, depuis le retour, vendredi soir, du chef de l'Etat ukrainien. La rumeur s'est répandue comme une trainée de poudre sur Internet, dans les médias ukrainiens et sur la place de l’Indépendance : « Ianoukovitch a vendu l’Ukraine à la Russie ».

Lors de sa visite à Sotchi vendredi, le président ukrainien aurait obtenu de l’argent et une ristourne sur le prix du gaz contre la promesse d’intégrer l’union douanière, cet espace de libre échange voulu par Vladimir Poutine, qui comprend la Russie, la Biélorussie et le Kazakhstan.

En dépit des démentis du Kremlin, puis de Kiev, l'opposition ukrainienne s'est engouffrée dans la brèche. « Il a besoin d'argent pour la survie de son régime », a lancé Arseni Iatseniuk, l'un des trois chefs de l'opposition, agitant l'épouvantail d'une « nouvelle Union soviétique qui signifierait la désagrégation du pays ».

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Même tonalité du côté des eurodéputés du Parti populaire européen venus en visite à Kiev : « président Ianoukovitch, la porte est toujours ouverte, écoutez les gens du Maidan, de la place et non ceux qui sont dans un palais à Sotchi », a lancé devant les manifestants le parlementaire Elmar Brok.

La présidence ukrainienne, le Premier ministre Azarov, et le porte-parole de Vladimir Poutine ont démenti les rumeurs : aucun accord définitif n'a été conclu sur les bords de la mer noire. Pas de quoi calmer l'opposition, qui redoute que la réunion ministérielle prévue dans 10 jours à Moscou ne se solde par un tel arrangement.


Mikhail Saakachvili : « Allons nous revenir au désastre soviétique ?»

Ce samedi, dans l'après-midi, l'un des critiques les plus virulent de Vladimir Poutine, l'ancien président géorgien Mikhail Saakachvili, s'est adressé en ukrainien à la foule, qui lui a fait une ovation. Porté au pouvoir en 2003, à la faveur de la révolution de la rose, il est venu soutenir les manifestants pro-européens.

« Je ne suis ni un tacticien ni un théoricien des révolutions mondiales, a-t-il lancé. Mais je voudrais leur dire et leur souhaiter d’être patients, de se battre pour leurs droits à échéance. Ils ne sont pas là pour tel ou tel homme politique, ils sont là pour le futur de ce pays ».

Mikhail Saakachvili, ennemi juré du Kremlin, estime que les Ukrainiens doivent tout faire pour ne pas intégrer le projet d’union eurasiatique voulu par Vladimir Poutine. 

« Avec l’Union eurasiatique, plus vous êtes corrompu, plus vous avez un caractère criminel, mieux vous êtes accueillis. Ici, il n’est pas question de bataille géopolitique, mais de choix de vie. Aurons nous une vie normale, décente, ou allons nous revenir au désastre soviétique, que ma génération a connu ? Nous ne souhaitons pas la même chose aux jeunes gens. »

Ces mêmes jeunes gens avec lesquels l’ancien président géorgien a ensuite longuement échangé, en prenant un bain de foule entouré de ses gardes du corps, au milieu des tentes, des drapeaux et des braséros de la place de l’Indépendance.

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