Turquie: la mixité dans les résidences d'étudiants dans le collimateur du pouvoir

La Turquie est en émoi, après que le Premier ministre a jeté son dévolu, le week-end dernier, sur la mixité hommes-femmes dans les résidences d’étudiants. Recep Tayyip Erdogan a promis d’y mettre bon ordre, au nom de la morale. Il a demandé aux préfets d’enquêter dans les appartements privés et enjoint aux particuliers de dénoncer les cohabitations « abusives ».

Avec notre correspondant à Istanbul, Jérôme Bastion

L’affaire est en bonne voie : les trois quarts des résidences d’étudiants du pays ont déjà été séparés et au 1er janvier, il ne devrait plus rester le moindre établissement mixte. Olva, 19 ans, va être relogée dans une résidence réservée aux filles, mais elle ne voit pas vraiment ce qui pose problème dans son pensionnat actuel, soi-disant mixte : « Filles et garçons ont des dortoirs à part ; il n’y a qu’à la cantine qu’ils peuvent se retrouver et discuter. Il n’y a là rien à surveiller par qui que ce soit. »

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Voilà pour les institutions contrôlées par l’Etat. Mais le Premier ministre ne compte pas en rester là : il veut empêcher les colocations privées de jeunes de sexes opposés, une cause d’échec, selon lui. « Ce qui se passe là-bas n’est pas clair. Toutes sortes de choses peuvent arriver. Et alors les parents se plaignent, et demandent : "Que fait l’Etat  ?" », a précisé M. Erdogan.

Vers une police de la vertu ?

Malgré plusieurs démentis apparemment gênés de certains officiels, Recep Tayyip Erdogan a redit, mardi 5 novembre, sa détermination d’en finir avec cette pratique : « Nous faisons et ferons ce qu’il faut. En tant que pouvoir d’inspiration démocrate et conservatrice, nous nous devons d’intervenir. »

Là encore, Olva ne comprend pas : « Si les voisins sont dérangés, il peut y avoir plainte. Mais s’il n’y a pas de motivation, pourquoi s’en mêler ? L’Etat n’a pas à s’occuper de ça ! » Il n’a pas encore été décidé, pour l’instant, de créer une véritable police des moeurs, mais certains craignent que cela ne tarde plus.

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