Avec notre correspondant à Istanbul, Jérôme Bastion
C'est une séance presque ordinaire et néanmoins historique pour le Parlement de la République laïque de Turquie, qui doit retourner Mustafa Kemal Atatürk dans sa tombe. Comme elles l’avaient annoncé depuis quelques jours, les 4 députées du Parti de la justice et du développement, tout juste rentrée de leur pèlerinage à la Mecque, ont assisté voilées aux débats sans susciter le moindre éclat de voix.
Même l’opposition sociale démocrate avait pour consigne de ne pas créer d’incident, et chacun sur les bancs de l’Assemblée s’est félicité de cette transition en douceur. Oublié donc le tumulte causé il y a 14 ans par l’apparition de la jeune élue voilée Merve Kavakçi qui n’avait pu prêter serment et avait été expulsée sur ordre du Premier ministre Bülent Ecevit.
Le paradoxe, c’est que depuis cette crise le règlement intérieur de l’Assemblée nationale n’a pas changé d’un iota. Ce règlement d’ailleurs ne mentionne aucune interdiction de se couvrir la tête, mais la suppression au début du mois de la loi bannissant le foulard islamique dans la fonction publique a permis de briser ce tabou.
L’entrée du voile aura permis, par ricochet, de mettre fin à une autre interdiction, celle du pantalon pour les femmes qui lui était jusque là expressément censuré. Les formations parlementaires se sont mises d’accord pour en finir avec cet autre tabou, sexiste cette fois.