Avec notre correspondant à Varsovie, Damien Simonart
De la joie mais pas d'euphorie en Pologne, pas de rassemblement, la vie suit tranquillement son cours presque comme si de rien n'était. Il faut dire que cette annonce n'est une surprise pour personne. Au contraire, c'est presque un soulagement car les Polonais réclament cette canonisation depuis la mort de Jean-Paul II le 2 avril 2005. « Santo subito ! » (« Canonisez le tout de suite! » en latin), criait la foule place Saint Pierre à Rome, lors des funérailles du souverain pontife.
Comme le soulignent les responsables de l'épiscopat polonais, ce vœu est aujourd'hui en passe d'être réalisé. La Pologne attend désormais avec impatience la date de la cérémonie. Les médias généralistes spéculent sur le 8 décembre, fête de la Vierge Marie, mais la presse catholique penche plutôt sur une date proche du 16 octobre, jour anniversaire du début du pontificat de Jean-Paul II.
Un des instigateurs de la chute du communisme en Pologne
Huit ans après sa mort, Jean-Paul II reste très présent dans l'esprit des Polonais. Il a laissé un héritage immense à la Pologne. La liberté pour commencer, car il a été l'un des principaux instigateurs de la chute du communisme en Pologne, avec Lech Walesa, le fondateur du syndicat Solidarité. Et puis un héritage spirituel évidemment. L'Eglise polonaise est très influente et il n'est pas étonnant que plus de 90% de la population se déclare catholique.
De façon plus visible, le culte de Jean-Paul II est largement cultivé en Pologne. Bien que ce dernier ne le souhaitât pas, des dizaines de statues à son effigie sont construites chaque année, il n'y a pas une grande ville dans le pays qui n'ait pas une rue à son nom. Il y a aussi un aéroport Jean-Paul II, des écoles Jean-Paul II ou encore des centres culturels Jean-Paul II. Et ce n'est pas sa canonisation qui va freiner l'expansion de ce culte.
L'Eglise de plus en plus mise à l'écart
Toutefois, des voix commencent à s'élever contre l'Eglise. Pour le moment c'est une minorité mais la Pologne est en train de changer. Son entrée dans l'Union européenne, son ouverture au monde font que de nouvelles idéologies, libérales, arrivent dans le pays. Aux dernières élections législatives, un parti politique ouvertement anticlérical, le mouvement Palikot, a pris la troisième place et est entré au Parlement. Parmi ses figures de proue figurent un député homosexuel et un autre transsexuel. Du jamais vu en Pologne auparavant. Ces derniers militent entre autres pour la légalisation des couples homosexuels, ce à quoi l'Eglise s'oppose fortement. Et globalement, ce parti politique réclame que l'Eglise arrête de mettre son nez dans les affaires de l'Etat.
Le clergé polonais estime que cette tentative de révolution n'aurait jamais eu lieu sous le pontificat de Jean-Paul II. Car tout le monde se rejoint sur ce point : Jean-Paul était une autorité, une autorité irremplaçable qui manque indiscutablement à la Pologne aujourd'hui.