De notre correspondant à Berlin
Abordage ou naufrage, telle est la question pour les pirates allemands. Les nouveaux venus de la politique germanique parviendront-ils, après quatre succès électoraux régionaux, à transformer l’essai pour faire élire des députés au Bundestag, le Parlement national, ce qui implique d’obtenir au moins 5% des voix ? Ou bien leurs propositions jusqu’à présent assez mono-thématiques autour de la liberté sur le net et des querelles homériques étalées en public vont-elles achever la chute déjà bien entamée du parti ?
Aux dernières régionales de janvier dans la région de la Basse-Saxe, les pirates n’ont obtenu que 2% des voix. Ces dernières semaines, les observateurs s’intéressaient avant tout au nouveau parti euro-sceptique « Alternative pour l’Allemagne » plus qu’aux sympathiques mais chaotiques pirates.
Le congrès de ce week-end a permis de remettre l’organisation pour partie en ordre. Les 1 200 militants ont remplacé un responsable dont les talents de cabarettistes indéniables avaient eu un franc succès dans les talk-shows mais l’intéressé avait sérieusement entamé la crédibilité d’un parti qui souffre par ailleurs du manque de notoriété de ses dirigeants.
Deuxième avancée ce week-end : l’adoption d’un programme aux thèmes plus larges. Car si les électeurs peuvent lors d’une élection régionale se laisser tenter par le côté rafraîchissant de ces nouveaux venus à des années lumières des pesanteurs de l’appareil politique traditionnel, un scrutin national comme celui du 22 septembre implique une « offre » électorale plus diversifiée.
Bien sûr, les pirates ont confirmé leur attachement à la démocratie directe et à l’absence de contrôles sur internet. Mais comme d’autres mouvements, ils ont adopté des propositions visant à corriger les inégalités sociales au centre des débats actuellement en Allemagne. Le congrès s’est prononcé pour l’introduction d’un salaire minimum généralisé ainsi que pour un revenu de base garanti ouvert à tout citoyen dès sa naissance.
Les pirates se sont montrés offensifs ce week-end. Une stratégie de bonne guerre pour tout parti à quatre mois des élections. Le mouvement est conscient qu’après la décrue des derniers mois, il joue gros. Un échec le 22 septembre ne signifierait pas nécessairement la fin de l’aventure. Les Verts, créés en 1980, n’avaient par exemple réussi que lors de leur deuxième participation aux élections nationales à entrer au Bundestag.
Un sondage rendu public ce week-end a mis du baume au cœur des pirates. Alors qu’ils végétaient à 2% dans les dernières enquêtes d’opinion, ils sont crédités désormais de 4% et se rapprochent de la barre fatidique des 5%. Il reste au parti quatre mois pour faire oublier le flou et les querelles du passé et créer la sensation.