Le premier tour de scrutin vu d'Allemagne

Comment a été perçue la campagne électorale en Allemagne? On le sait, Nicolas Sarkozy est le principal allié de la chancelière Angela Merkel. Le duo central en Europe a été baptisé « Merkozy » pour souligner son côté fusionnel. Comment les Allemands, leur gouvernement et leur presse, perçoivent-ils les résultats du premier tour?

Avec notre correspondant à Berlin, Pascal Thibault

La presse allemande parle, pour citer quelques titres, « d’une défaite cinglante » pour Nicolas Sarkozy, « d’une humiliation », « du vote d’une nation frustrée par l’Etat du pays et en colère contre son président ».

Le quotidien de centre gauche de Munich Süddeutsche Zeitung dresse un nouveau bilan, comme beaucoup d’autres avant lui, au vitriol, du président sortant. Mais il faut dire aussi que l’enthousiasme pour François Hollande reste modéré dans la presse allemande. Dans ce même journal, le candidat socialiste est considéré comme le 'moins pire' des prétendants. Le Financial Times Deutschland estime par exemple que le candidat socialiste, par sa personnalité, pourrait faire passer des réformes nécessaires, mais en même temps, le quotidien économique évoque le risque que la capacité de consensus de la société française après cinq ans de sarkozysme soit au plus bas.

Les réactions politiques sont assez modestes. C’est avant tout la gauche allemande qui se félicite du score de François Hollande et qui espère que son succès le 6 mai fera infléchir la politique d’Angela Merkel au niveau européen.

Des commentaires très négatifs dans l'ensemble

Réactions très négatives en effet sur l’état d’un pays considéré comme assez sclérosé avec beaucoup de problèmes, incapable de se réformer avec une campagne qui ne répondait pas aux questions. Des réactions négatives sur le bilan de Nicolas Sarkozy, mais également sur François Hollande: une presse allemande peu convaincue. On a parlé dans un quotidien conservateur du « rétro président évoquant des idées des années 1970 », une gauche étatiste avec des recettes d’avant-hier qui ne permettent pas de solutionner les problèmes d’aujourd’hui.

La défaite annoncée par les sondages de Sarkozy au 2ème tour

Angela Merkel avait misé sur une victoire de Nicolas Sarkozy. Elle devait même, pendant un temps, intervenir dans des meetings électoraux du président-candidat, ce qui n’a pas été le cas.

Entre-temps, comme le prédisent les derniers sondages, les milieux gouvernementaux à Berlin tablent aussi sur une victoire de François Hollande. Le principal sujet qu’ils devront clarifier si François Hollande est élu, dans les semaines qui suivront le 6 mai, c’est l’avenir du pacte fiscal. Il s'agit d'un projet très important au niveau européen d’Angela Merkel et l'on sait que François Hollande souhaite le renégocier, ou le modifier, de façon à y ajouter des éléments pour la croissance européenne. Il faut dire aussi que pour Nicolas Sarkozy, il y a eu quelques irritations dans les milieux gouvernementaux, en raison de ses déclarations cette dernière semaine sur Schengen ou encore, il y a une semaine, sur le rôle de la Banque centrale européenne.

Néanmoins, une victoire de François Hollande pourrait peut-être servir Angela Merkel, grâce à des compromis qu’elle pourrait faire, notamment au niveau européen. Ce faisant, elle aurait une chance de séduire l’opposition social-démocrate, en vue d’un remake de la grande coalition dans un an et demi, la perspective la plus probable aujourd’hui en Allemagne.

Partager :