Bruxelles : le sommet de la dernière chance

Après deux ans de sommets à répétition sans réponse suffisante à la crise, les Vingt-Sept se réunissent ce mercredi soir, 26 octobre 2011, à Bruxelles. Ils vont tenter une nouvelle fois de sauver la monnaie unique. Une réunion que l'on dit décisive pour la zone euro.

Contraint de s’entendre, le couple franco-allemand doit impérativement apporter ce soir des réponses crédibles pour sauver l'euro. Néanmoins l’espoir de voir le sommet déboucher sur une résolution durable est mince, tant les différends au sein du duo Sarkozy-Merkel subsistent.

Certes, il y a des avancées sur le sauvetage de la Grèce, sur la recapitalisation des banques, mais des désaccords persistent sur le rôle de la Banque centrale européenne ou sur le renforcement du fonds de soutien européen. Doté d'un montant de 440 milliards d'euros, Paris le juge insuffisant pour venir en aide à des pays vulnérables comme l'Espagne ou l'Italie et souhaite le renforcer. Le Fonds européen de stabilité financière (FESF), considéré comme l’un des piliers de la résolution de la crise, est donc à la recherche de nouvelles sources de financement. La visite, vendredi 28 octobre à Pékin, du directeur du Fonds Klaus Regling qui a été annoncée ce matin, n’est peut-être pas étrangère à ce besoin accru de financement. Si les 17 décident d’ouvrir le fonds de secours à des investisseurs étrangers, Pékin pourrait être un partenaire important.

Dramatisation des politiques

De son côté la chancelière allemande, Angela Merkel, a obtenu mercredi après-midi l’aval des parlementaires allemands sur l’augmentation du fonds a une écrasante majorité (503 pour, 89 contre et 4 abstentions). Rien n'est réglé cependant et les dirigeants politiques tiennent un discours alarmiste. Le Premier ministre français, François Fillon, a lancé, mardi 25 octobre, une mise en garde contre un éventuel échec qui « pourrait faire basculer le continent européen vers des terres inconnues ».

Il y a une dramatisation de la part des politiques qui ne cachent plus leurs inquiétudes et veulent un changement rapide. Mais pour l'économiste Jean Pisany-Ferry, ce serait une erreur de croire qu'à l'issue de ce sommet des décisions définitives seront prises. « On est dans une logique de traiter les problèmes les uns après les autres, c’est insatisfaisant car finalement des décisions de très longues portées sont prises à la faveur de traitement de cas d’urgence ».

Ce règlement de la crise de la dette est une réelle épreuve pour les pouvoirs en place. Chacun tente d'imposer les solutions qui lui seront le plus favorables. La récente altercation entre le président français Nicolas Sarkozy et le Premier ministre britannique David Cameron en est la preuve. Ce dernier a manifesté son mécontentement de ne pas être convié à participer aux discussions, et s'est fait remettre à sa place par Nicolas Sarkozy qui lui a rappelé que son pays n’avait pas voulu de la monnaie unique.

Cette escarmouche illustre la discorde entre les 17 dirigeants de la zone euro et les dix autres dirigeants européens. D’ailleurs, il était prévu que les 27 ministres des Finances se réunissent ce mercredi après-midi avant le sommet, mais finalement la réunion a été annulée sans explication. Cette réunion du Conseil Ecofin était une demande des pays non membres de la zone euro. En fait, deux rencontres vont se tenir : la première à 18 heures avec les 27 chefs d’Etat et de gouvernement de l’Union européenne, suivie d’un sommet restreint avec les 17 de la zone euro.

Enrayer la crise tout en ménageant l'avenir politique de chacun

L'exercice est délicat, car les politiques doivent à tout prix enrayer la crise tout en ménageant leur avenir. Le premier concerné est Nicolas Sarkozy : même s’il ne s'est pas encore déclaré candidat, il a dans le viseur l'élection présidentielle de 2012. Pour Angela Merkel, l'échéance est pour 2013, et en Grande-Bretagne le Premier ministre subit la pression des anti-euro. Du coup, l'idée de parler d'une même voix paraît de plus en plus difficile à trouver. L'ancien Premier ministre belge Guy Verhofstadt, actuellement président du groupe des libéraux et démocrates au Parlement européen, considère qu’une gouvernance économique européenne est nécessaire : « A côté du Conseil de la zone euro, il faut organiser un gouvernement économique à l’intérieur de la Commission européenne en désignant un commissaire qui serait responsable pour la gestion de la zone euro ».

Une gouvernance économique européenne qui pourrait aussi répondre au risque de contagion. L’Italie, par exemple, inquiète de plus en plus Bruxelles. Depuis le week-end dernier, la pression monte autour du président du Conseil italien Silvio Berlusconi. Sommé par le duo franco-allemand de mettre de l'ordre dans ses finances, il doit présenter aujourd'hui un projet de restructuration de sa dette accompagné de mesures concrètes. Mais avant, il doit convaincre les Italiens qui pour le moment ne veulent pas en entendre parler.

Si ce soir les 17 approuvent les propositions franco-allemandes ils n'en ont pas pour autant fini avec les dettes souveraines. Avec un déficit public de plus de 3% du PIB, la plupart des pays de la zone euro ne respectent pas le traité de Maastricht, et il faudra donc encore des années pour y parvenir.
 

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