Avec notre correspondante à Londres, Muriel Delcroix
Chacun fourbit ses armes avant ces auditions, considérées comme les plus importantes jamais tenues par une commission parlementaire. Il a d’ailleurs fallu que ses membres tapent du poing sur la table pour faire venir les Murdoch. Après un premier refus, ils ont utilisé une procédure rare : une convocation en bonne et due forme.
Dix députés issus de la majorité et de l’opposition vont donc interroger Rupert Murdoch, patron d’un des empires de presse les plus puissants au monde, et son fils James. Une heure plus tard, c’est une de leurs proches, Rebekah Brooks, qui s’assiéra à leur place dans une petite salle à laquelle seulement cinquante personnes peuvent accéder.
Une séance sans lynchage
Le président de la commission, un conservateur, a promis que les députés garderaient calme et sang froid lors de séances sans lynchage. Les parlementaires vont ainsi tenter de savoir qui était au courant, et jusqu’à quel niveau, des écoutes téléphoniques pratiquées par le News of the World. Le groupe soutenait depuis le début que ces piratages téléphoniques n’était le fait que d’un reporter isolé, or avec la découverte de 11 000 documents et alors que 4 000 personnalités auraient été visées, cet argument ne tient plus.
Certains s’interrogent toutefois sur la pugnacité de cette commission et rappellent qu’elle avait déjà en 2003 entendu Rebekah Brooks, qui avait admis avoir payé la police en échange d’informations. Des déclarations fracassantes auxquelles pourtant la commission n’avait pas donné suite.
Une mort suspecte
La photo du journaliste Sean Hoare est à la Une de presque tous les quotidiens et sa mort soudaine vient ajouter une note sombre et mystérieuse à ce scandale. Le corps du reporter, qui avait de graves problèmes d’alcool et de drogue, a été retrouvé sans vie chez lui lundi matin, et si la police pour l’instant se contente de dire que sa mort n’est pas considérée comme suspecte, nombre de commentateurs évoquent un suicide.
Sean Hoare était une pièce maîtresse dans l'affaire des écoutes téléphoniques. En septembre dernier lorsque le New York Times a déterré l’affaire, classée en 2007, c’est lui, ancien reporter au Sun et au News of the World, qui avait révélé les méthodes très limites des tabloïds du groupe Murdoch.
Ex-collègue et proche d’Andy Coulson, patron démissionnaire du News of the World, Sean Hoare avait alors affirmé le premier que Coulson était en fait parfaitement au courant et encourageait des écoutes illégales menées par des dizaines de journalistes chassant les scoops dans tous les domaines. La semaine dernière encore, Sean Hoare avait à nouveau évoqué le scandale. Il avait alors exprimé le désir que cette affaire fasse évoluer les méthodes de la presse britannique.