Silvio Berlusconi brandit le spectre de la crise financière et obtient la confiance du Parlement

Le Premier ministre italien refait un discours devant la Chambre des députés à Rome, ce mercredi 22 juin. Après deux défaites coup sur coup, le Premier ministre italien Silvio Berlusconi tente de rebondir. Il s'est posé en rempart contre les « attaques spéculatives des marchés » et a obtenu, hier, un vote de confiance au Parlement. Il s'est dit convaincu que son gouvernement resterait en place jusqu'en 2013.

Le « Cavaliere » vient de montrer que, malgré deux défaites électorales en moins d'un mois, il garde toujours une majorité au Parlement. Il a dû affronter la défaite aux municipales, y compris à Milan, son fief historique. Ensuite, les Italiens ont participé à une large majorité au référendum, et ils ont rejeté l'immunité du chef du gouvernement, empêtré dans des scandales et des procès à répétition. On a parlé, dans ce contexte, de crise politique à Rome, et l'opposition de gauche commence à croire en ses chances de revenir au pouvoir. 

Le député Jean-Léonard Touadi, du Parti démocrate, exprimait son espoir, hier, en marge de la réunion parlementaire de Rome : « Tous les sondages donnent le Parti démocrate, avec ses alliés, gagnant à n'importe quelle élection, à n'importe quel moment. Il y a donc une alternative politique, prête à assumer le gouvernement du pays, avec un programme et surtout avec une coalition formée, entre autres, avec les déçus du berlusconisme ».

Mais pour l'instant, Silvio Berlusconi rejette l'hypothèse des élections législatives anticipées et il conserve son soutien parlementaire. Mais faut-il vraiment conclure que son gouvernement est hors danger? Pas vraiment. La coalition entre le « Peuple de la liberté », le parti du Cavaliere, et la Ligue du Nord d'Umberto Bossi, bat de l'aile. Umberto Bossi a menacé de retirer son soutien  dans quelques mois, si  l'exécutif n'annonce pas d'ici là, des allégements fiscaux. C'est une partie assez compliquée, qui se joue au sein même du gouvernement.

Giuseppe Bettoni, professeur à l'université Tor Vergata  de Rome, décrypte la situation: « D'une part, M. Berlusconi a envie de récupérer une partie de l'électorat et il croit, avec la Ligue du Nord, que le meilleur moyen est de réduire la pression fiscale. Monsieur Giulio Tremonti, qui est pratiquement un homme de la Ligue du Nord à l'intérieur du parti de Berlusconi, et qui est en même temps ministre de l'Economie, sait pertinemment qu'il est compliqué de réduire la pression fiscale sur les citoyens, tout en cherchant à remettre les choses en état au niveau budgétaire, pour l'Etat italien ».

La question qui se pose est si la relative instabilité politique de l'Italie ne risque de déclencher une crise financière, comme celle qui frappe la Grèce, ou encore l'Irlande ou le Portugal. Jean-Paul Fitoussi, professeur  d'économie à Paris et à Rome, n'écarte pas complètement ce risque, même si, pour lui, les fondamentaux du pays sont assez bons. « L'Italie est, parmi les grands pays européens, celui dont le déficit budgétaire est le plus faible. La situation des finances publiques italiennes est saine ».

Le seul point noir c'est la dette publique importante, de près de 120% du PIB, et son coût  pourrait poser problème en cas d'attaque spéculative. L'agence de notation financière Moody's envisage d'ailleurs « une dégradation de la note de l'Italie ». Mario Liberti, directeur de recherches à l'Institut des relations internationales et stratégiques de Paris, replace toutefois les choses dans un contexte politique. « La décision de Moody's est à considérer comme un avertissement à Silvio Berlusconi et à la Ligue du Nord de ne pas relâcher l'attention et les efforts sur les comptes publiques du pays, pour ne pas faire évoluer les choses vers un scénario à la grecque, qui serait une véritable déflagration atomique sur la scène internationale ».

Silvio Berlusconi tente d'assurer sa survie politique par tous les moyens, ses déclarations d'hier en sont la preuve. Il dit, en somme, « c'est moi et la stabilité politique, ou bien  l'instabilité et la hausse catastrophique du coût de la dette ». Cette stratégie pourrait s'avérer payante sur le moment, mais les choses risquent de se compliquer d'ici quelques semaines : le Parlement  devra alors examiner les mesures pour combler le déficit budgétaire jusqu'en 2014. Et là, les dissensions entre le Premier ministre et ses alliés pourraient refaire surface. 

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