Kosovo : législatives anticipées sur fond de chômage et de corruption

1,6 million d’électeurs kosovars sont appelés à élire, dimanche 12 décembre 2010, les 120 députés du Parlement de Pristina. Le gouvernement du Premier ministre Hashim Thaçi est tombé après la démission surprise du président de la République, Fatmir Sedjiu, et le retrait de ses ministres de l’exécutif. Le parti de Thaçi reste bien placé, mais une nouvelle alliance avec l’autre grand parti de centre-droit ne semble pas à l’ordre du jour. Autoproclamé indépendant en février 2008, le Kosovo reste très pauvre et son économie est minée par la corruption et le chômage.

Les jeunes sont les plus touchés par le chômage. Les moins de 25 ans représentent 60% de la population du nouvel Etat des Balkans et jusqu’à 70% d’entre eux sont sans emploi. Selon la Banque mondiale, 48% de la population active est au chômage et le Kosovo reste l’un des pays les plus pauvres d’Europe, avec un PIB par habitant de seulement 1 760 euros. Dans ces conditions, les jeunes Kosovars sont déçus par leurs responsables politiques. Beaucoup d’entre eux rêvent de quitter le pays et, parmi ceux qui ne l’ont pas encore fait, nombreux sont ceux qui ne devraient pas voter au scrutin législatif. En tout cas, ils jugent sans complaisance les deux formations de centre-droit qui dominent la vie politique du Kosovo depuis l’indépendance.

La formation du Premier ministre Hashim Thaçi, contraint à la démission en novembre, garde la première place dans les sondages, avec plus de 30% d’intentions de vote. Mais le Parti démocratique du Kosovo (PDK) ne peut plus compter sur son ancien allié, la Ligue démocratique du Kosovo (LDK), dirigée par le maire de la capitale, Isa Mustafa. Celui-ci revendique l’héritage de l’ancien président Ibrahim Rugova, symbole de la résistance pacifique à la Serbie, alors que Hashim Thaçi, ancien chef de l’Armée de libération du Kosovo, a gagné sa popularité par les armes. La LDK, créditée de 28% d’intentions de vote, ne veut plus s’allier avec le PDK. La formation mise sur la réputation d’honnêteté de son leader Isa Mustafa et met en avant le fait que six ministres de Hashim Thaçi font l’objet d’une enquête de la mission européenne Eulex, pour corruption ou crime organisé.

Un test pour la maturité démocratique du Kosovo

Deux autres partis politiques pourraient tirer leur épingle du jeu et participer à la formation du futur gouvernement de Pristina. Le Mouvement pour l’autodétermination d’Albin Kurti est un parti de gauche qui critique la présence internationale au Kosovo et souhaite le rattachement à l’Albanie. Le Parti du nouveau souffle se place au centre de l’échiquier politique kosovar et ses jeunes dirigeants ont tous des diplômes prestigieux, obtenus aux Etats-Unis ou en Europe. Le futur Parlement de Pristina sera, en tout cas, le premier organe législatif élu, après la proclamation de l’indépendance du pays en février 2008. Il s’agit d’un test pour la maturité démocratique du Kosovo et pour la volonté de ses dirigeants de continuer le processus d’intégration européenne. Pour cela, le dialogue avec Belgrade s’annonce indispensable.

Le vote des Serbes kosovars sera suivi avec une grande attention. Les autorités de Serbie, tout comme l’influente Eglise orthodoxe, n’affichent plus une position aussi tranchante que par le passé, mais considèrent que les conditions ne sont pas encore réunies pour une participation des Serbes du Kosovo aux législatives de dimanche. De fait, les 40 000 habitants de l’enclave de Kosovska Mitrovica, située au nord du pays et limitrophe de la Serbie, s’apprêtent à boycotter le scrutin. Mais ailleurs, les Serbes kosovars votent, en tenant compte de leurs intérêts et des réalités du terrain. Près de Pristina, le maire de l’enclave serbe de Gracanica appelle au vote, tout en soulignant qu’il ne s’agit en aucun cas d’une reconnaissance de l’indépendance du Kosovo. Soixante- douze pays, dont les Etats-Unis et 22 membres de l’Union européenne ont reconnu jusqu’à présent le jeune Etat kosovar. 

Partager :