L'opposition russe face à la répression

Malgré l'interdiction systématique de ses manifestations, l'opposition russe continue à braver la répression. Mardi 31 août 2010, comme tous les 31 de chaque mois qui compte 31 jours, elle a mobilisé ses militants pour défendre la liberté de rassemblement. Une centaine de personnes ont été interpellées. 

Lundi 31 mai, samedi 31 juillet, mardi 31 août… Pourquoi appeler à défiler les « 31 » ? Pour défendre l’article 31 de la Constitution russe : « Les citoyens de la Fédération de Russie ont le droit de se rassembler pacifiquement, sans armes, de tenir des réunions, meetings et manifestations, des marches et piquets ».

Ces rassemblements réguliers ont lieu à Moscou, Saint-Pétersbourg et dans une quarantaine de villes russes. Dans la capitale, le rendez-vous est toujours le même : place Trioumfalnaïa, en plein centre ville. Et la réponse de la municipalité à la demande d’autorisation des organisateurs est, elle aussi, toujours la même : interdiction de manifester. Un refus souvent opposé de manière indirecte.

Pour la manifestation de ce 31 août, la mairie a annoncé avoir fermé les accès à la place Trioumfalnaïa, arguant de la construction d’un parking de 1 000 places. Un chantier prévu depuis plusieurs années mais qui n’a jamais pu commencer faute de budget suffisant. L’empressement avec lequel la ville de Moscou a fermé la place est dénoncé par l’opposition. Selon les organisateurs, c’est un prétexte pour éviter que l’opposition anti-Poutine ait la moindre visibilité, alors même que d’autres manifestations, notamment celles du Parti communiste, sont régulièrement autorisées sur cette place centrale de la capitale.

Une volonté de résister

Non-autorisés, ces regroupements sont largement symboliques. Ils témoignent d’une volonté d’exister, de résister. Coûte que coûte. Ils sont le plus souvent dispersés par les forces de l’ordre, en civil ou harnachées et casquées comme les OMON, les forces anti-émeutes. Les quelques dizaines de manifestants ont à peine le temps de lancer un slogan ou de déployer une banderole qu’ils sont déjà dans les fourgons, interpellés par la police.

Le Premier ministre russe Vladimir Poutine l’a encore réaffirmé, lundi 30 août, dans une longue interview au journal Kommersant : « Si vous n’avez pas obtenu l’autorisation de manifester de la part des autorités locales, vous recevrez des coups de matraque sur la tête ». Or, pas la peine de requérir une autorisation, semble-t-il. Depuis plus d’un an, les organisateurs des manifestations du 31 n’ont jamais réussi à en obtenir, « coups de matraque » et arrestations assurées. Des interpellations qui n’épargnent personne. Jeudi 31 décembre, c’était Lioudmila Alexeeva, 82 ans, ex-dissidente soviétique et militante des droits de l’homme, qui était arrêtée manu militari par la police malgré son âge et son passé.

Les mouvements d’opposition ne désarment pas

Malgré tout, les partis et les mouvements d’opposition ne désarment pas. Ils jouent à malin, malin et demi avec les autorités. Protestations contre la hausse des taxes ou l’abattage d’une forêt, les manifestants utilisent des revendications sectorielles et précises pour faire entendre leurs critiques du système Poutine.

Un système politique qui a une conception très large de l’opposition « extrémiste » qu’il convient de surveiller, d’étouffer et de réprimer. Le mouvement social fondé par Garry Kasparov « Front civil uni », le mouvement « Solidarité » de Boris Nemtsov, la coalition issue de la société civile « L’Autre Russie », le Mouvement pour les droits de l’homme, le « Front de gauche » de Sergueï Oudaltsov, le Parti national-bolchévique d’Edouard Limonov, les groupes antifascistes, les anarchistes. La plupart des mouvements politiques et des associations de défense des droits de l’homme sont victimes d’une forme ou d’une autre de répression de la part du pouvoir : menaces verbales et physiques, passages à tabac, arrestations et détentions, falsifications d’affaires pénales, assassinats. 

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