BCE: en attendant «super Mario», la magie n'y est plus

La Banque centrale européenne devrait annoncer demain à Francfort de nouvelles mesures pour soutenir l'économie. Une fois encore le sort de la zone euro parait suspendu aux décisions de Mario Draghi, le président de la BCE.

Depuis son arrivée à Francfort, le « patron italien de l'euro » hypnotise littéralement les marchés. Chacune de ses décisions ou de ses déclarations a le pouvoir de rassurer, et même d'enchanter les investisseurs. D'où ses surnoms : « super Mario » ou encore « le magicien », des qualificatifs qui contrastent avec l'image traditionnelle des banquiers centraux.

Cela doit beaucoup à sa personnalité, à son expertise, mais aussi au rôle croissant, démesuré, que ces hommes - et ces femmes pour parler de l'Américaine Janet Yellen à la tête de la Fed - ont pris dans la gouvernance économique depuis la crise de 2008. Aux États-Unis, au Japon, puis il y a tout juste un an dans la zone euro, ils ont osé faire fonctionner la planche à billets.

D'abord pour éviter l'assèchement du crédit. Ensuite, en 2015 en Europe, c'est surtout pour enrayer la menace de déflation, c'est-à-dire de baisse généralisée des prix que Mario Draghi passe à ce qu'on appelle dans le jargon financier l'assouplissement monétaire.

Une politique qui s’avère décevante

Car un an plus tard, l'inflation est toujours la même, +0,6%. Si on inclut les prix du pétrole en forte baisse depuis un an, on arrive même à une inflation négative -0,2% sur un an. Mario Draghi relativise. Il estime que sans l'assouplissement monétaire, la situation pourrait être bien pire. Beaucoup d'évènements ont compliqué sa tâche : d'abord ce contre-choc pétrolier, ensuite le ralentissement chinois. Faut-il en faire encore plus pour avoir de meilleurs résultats ?

C'est l'avis des investisseurs qui attendent que Mario Draghi sorte un nouveau lapin de son chapeau de magicien. La Banque centrale européenne pourrait par exemple racheter plus de titres dans les pays du sud de la zone euro, ce qui serait un soutien indirect à leur économie. Elle peut aussi une nouvelle fois baisser son taux sur les dépôts des banques pour les contraindre à faire du crédit, à faire circuler l'argent, au lieu de le laisser dormir à Francfort.

La BCE a-t-elle vraiment le pouvoir de ranimer l'activité et de réveiller l'inflation ?

Si les torrents de capitaux qu'elle déverse sur les marchés atteignaient les ménages et les entreprises, sa politique marcherait. Mais son principal effet pour le moment est d'enrichir les investisseurs à la recherche des meilleurs rendements, créant au passage des bulles sur les marchés qui menacent d'éclater… Sans jamais parvenir aux agents économiques de base.

Un économiste propose de zapper les banques et de distribuer directement l'argent de la BCE aux ménages sous forme de crédit d'impôt. C'est la théorie de la monnaie hélicoptère. Mais personne ne sait si cela sera vraiment plus efficace. Pourquoi dépenser plus - et donc relancer la demande et faire remonter les prix - si cette pluie est unique, interrogent les sceptiques ? Les ménages comme les entreprises ont besoin de confiance dans l'avenir pour investir et dépenser. Et cela, la Banque centrale européenne ne parvient pas seule à l'incarner.

La BCE demande régulièrement aux gouvernements de soutenir son action

En réformant, mais aussi en relançant la machine avec de l'investissement public. Mais les gouvernants européens sont pour la plupart aux prises avec des dettes monstrueuses qui les paralysent.

Faute d'alternative, la Banque centrale européenne renouvelle régulièrement sa panoplie en cherchant au moins à faire durer l'illusion. Mais pour combattre l'anémie de la demande et pour atténuer les effets de la compétition mondiale qui tirent les prix vers le bas, elle n'a pas de remède magique dans sa trousse.

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