Avec l’arrivée, hier, dans le golfe Persique du porte-avions Charles-de-Gaulle, désormais opérationnel, un nouveau cap semble franchi dans la lutte contre le groupe Etat islamique. « Le Charles-de-Gaulle s’en va-t-en guerre », s’exclame La Nouvelle République. « Dans la guerre », constate Var Matin. « La France monte en puissance contre Daech », lance Le Figaro.
Une « guerre assumée », affirme le quotidien d’opposition, qui s’en félicite. « Face au drapeau noir de l’État islamique, la France hisse son pavillon de plus en plus haut. Non seulement elle engage le porte-avions Charles-de-Gaulle dans le golfe Persique mais elle assume pleinement cette montée en puissance, comme en témoigne la présence du ministre de la Défense, Jean-Yves Le Drian, sur le pont d’envol à l’heure H. […] C’est un message à la fois militaire et politique que doit porter la France face à Daech, poursuit Le Figaro. Avec ses capacités de feu - l’équivalent d’une quinzaine de croiseurs lance-missiles -, le porte-avions Charles-de-Gaulle symbolise l’engagement résolu de la France dans une guerre imposée, et qu’il vaudrait mieux gagner. Nul autre pays ne partage avec les États-Unis un tel instrument de projection des forces : sa place est aujourd’hui au large de l’Irak. »
Ouest France pour sa part note « qu’une montée en puissance de la coalition est attendue dans les prochaines semaines. En soutien des troupes irakiennes. C’est là que s’insère l’annonce de l’engagement du Charles-de-Gaulle. Car à trois cents kilomètres des côtes italiennes, en Libye, Daech menace désormais l’Europe. C’est en lui ôtant ses sanctuaires en Irak et en Syrie que l’hydre pourra être vaincue. »
« Dans la même journée, relève Le Journal de la Haute-Marne, on a appris que le porte-avions Charles-de-Gaulle entrait en action contre Daech et que des passeports avaient été retirés à six jeunes susceptibles de se rendre en Syrie. Ce n’est sans doute pas un hasard. Le gouvernement entend sans doute montrer par là qu’il agit sur les deux bouts de la chaîne terroriste : la tumeur principale que l’aviation française doit traiter au Proche-Orient et les métastases que constituent les néophytes du jihadisme. La France s’engage ainsi un peu plus dans un conflit de moins en moins régional, car il affecte aussi de vastes pans de l’Afrique et fait sentir ses effets en Europe. »
Une prime pour le patron, pas pour les salariés…
A la Une également, un bonus qui fait scandale. Quatre millions d’euros pour Olivier Brandicourt, le nouveau patron du groupe pharmaceutique français Sanofi, en guise de cadeau de bienvenue ! « Pour les salariés, relève Libération, dont les primes collectives sont bloquées à zéro pour la seconde année consécutive, la nouvelle ne passe pas. « C’est à des années-lumière de ce que nous vivons », s’offusque Thierry Bodin, délégué central CGT. Un « mépris » dur à encaisser après la série de plans de restructuration et les 5 000 emplois supprimés par le groupe au cours des six dernières années, explique le syndicaliste. « Dans ce monde fou, poursuit-il, les actionnaires et les dirigeants se tiennent la main et trouvent toujours le moyen de s’enrichir. Les salariés, eux, se demandent s’ils auront un jour droit à quelques euros ». »
Libération note également que « l’exécutif pouvait difficilement rester silencieux. « Incompréhensible », s’étrangle le porte-parole du gouvernement, Stéphane Le Foll. « Il faut un peu de décence, notamment de la part de laboratoires pharmaceutiques qui vivent de la Sécurité sociale, donc des cotisations sur les salaires », note Ségolène Royal, la ministre de l’Environnement. »
Tout cela est bien beau, mais, relève Libération, en fait, « le gouvernement a abdiqué dans sa lutte contre les rémunérations indécentes. […] La taxe de 75 % des salaires supérieurs à un million d’euros était entrée en vigueur en 2013 pour une période de deux ans. Payée par près de 500 entreprises sur les rémunérations d’environ 1 000 dirigeants et salariés, la mesure aurait rapporté 400 millions d’euros en deux ans. Mais, elle vient d’être enterrée, au 1er janvier, pour le plus grand bonheur de ces patrons. »
A contrario, L’Opinion justifie cette prime de bienvenue au nouveau patron de Sanofi. « Comment se mesure l’indécence ?, s’interroge le quotidien d’opposition. N’est-ce pas une valeur subjective qui, bien au-delà du smic français, s’évalue par rapport à la réalité mondiale ? Or Sanofi, relève L’Opinion, c’est plus de 80 % de chiffre d’affaires et de profit hors de France. Son directeur général est à un niveau de responsabilité et de risque qui le met dans une toute petite population ultra-fermée, très bien payée parce que rare et à un poste révocable d’un claquement de doigts. […] Il est là le vrai choix, estime le journal : être ou ne pas être un dirigeant d’entreprise française, en France. Et y conserver les centres de décision, les richesses et les emplois qui vont avec. »
Alors, c’est vrai, reconnaît Le Midi Libre, « Sanofi est une entreprise privée et, à ce titre, peut disposer de ses liquidités à loisir. Le mode de rémunération de ses dirigeants et la redistribution des richesses au sein de cette entreprise ne nous regardent pas. Olivier Brandicourt peut toucher son million par an ainsi que les quatre promis au titre du débauchage. Sauf que… Sauf que, Sanofi depuis six ans a supprimé plus de 5 000 emplois et qu’au titre du Cice, la société a bénéficié de 27 millions de l’État. » Qui plus est, note encore Le Midi Libre, « la jurisprudence Brandicourt obscurcit l’image des milliers de petits patrons qui, tous les jours, en France s’efforcent de remplir leur carnet de commande. Pour eux, la pilule Sanofi est vraiment amère. »
Les époux Balkany dans le collimateur de la justice
Enfin, on revient à Libération avec ces révélations, en Une, sur le couple Balkany. D’après le journal, « la justice dispose d’indices accablants reliant le couple d’élus des Hauts-de-Seine à deux villas de Marrakech et Saint-Martin. Libération a eu accès à de nouveaux éléments de l’enquête. » Du coup, poursuit le journal, « Patrick Balkany retient son souffle. D’ici quelques jours, le bureau de l’Assemblée nationale doit se prononcer sur la levée de son immunité parlementaire, réclamée par les juges. Une décision à haut risque pour l’indéboulonnable député et maire de Levallois-Perret, qui risque gros. »
D’où provient la fortune du couple ? Il y a une origine familiale pour Isabelle Balkany, mais cela n’explique pas tout. « L’argent qui a servi à acheter l’une des villas provenait de comptes singapouriens, affirme Libération. Qui a apporté ces millions d’euros ? […] Tracfin, la cellule anti-blanchiment de Bercy, a la preuve, affirme le journal, que les comptes singapouriens ont été alimentés en juin 2009 par deux virements d’un montant total de 4,4 millions d’euros, versés depuis le compte suisse de George Forrest. Très implanté en Afrique, surnommé « le roi du Katanga », cet industriel belge a expliqué aux juges que cette somme correspondrait à une commission versée dans le cadre du rachat de la société Forsys, installée en Namibie. » Patrick Balkany dément formellement.
En fait, poursuit Libération, les juges se demandent si ces 4,4 millions ne proviennent pas plutôt de l’affaire Uramin, en Centrafrique cette fois, du nom de cette société minière achetée 2,5 milliards d’euros par Areva en 2007, alors présidée par Anne Lauvergeon. « Un dossier dans lequel Patrick Balkany a joué le monsieur bons offices aux côtés du même George Forrest. » Commentaire de Libération : « Patrick Balkany est-il un Cahuzac des alizés ? Sa femme une princesse des mille et une fraudes ? L’enquête est en cours. En attendant, leur retrait de la vie politique serait un service éminent rendu à l’image de nos élus, qui valent mieux que ce compagnonnage compromettant. »