L’économie russe en souffrance

Américains et Européens ont annoncé dans la journée une nouvelle vague de sanctions économiques à l'encontre de la Russie. Les États-Unis vont imposer des sanctions à sept responsables russes et 17 sociétés proches de Vladimir Poutine. Quant à l'Union européenne, elle va ajouter 15 noms de responsables russes et ukrainiens pro-russes à sa précédente liste des personnes sanctionnées. Les Occidentaux veulent ainsi contraindre Moscou à la désescalade militaire en Ukraine. Quel a été l'impact économique des premières mesures décidées à Bruxelles et à Washington ?

Signalons déjà que ces sanctions ont été inopérantes sur le plan diplomatique ou militaire. Moscou a bien pris des engagements à Genève, mais s'est bien gardé de les respecter. Les sanctions n'ont donc pas atteint leurs objectifs ultimes, en revanche l'économie russe en a bien été affaiblie ; cet affaiblissement est d'ailleurs plus une conséquence du climat d'instabilité généré par le conflit autour de l'Ukraine que le résultat direct des sanctions. Les premières mesures concrètes, dites de phase 2 en l'occurrence, les deux listes noires, l'une américaine, l'autre européenne, des personnalités russes non grata en Occident, ont été adoptées à la mi-mars.

Or, les investisseurs ont commencé à déserter la place moscovite dès janvier, c'est-à-dire dès qu'ils ont estimé que le bras de fer sur l'Ukraine était potentiellement dévastateur pour leurs intérêts. Au cours du premier trimestre, la fuite des capitaux a été aussi importante qu'en une année. Elle a été le fait des investisseurs étrangers jouant la prudence, comme celui des grandes fortunes russes cherchant à se mettre à l'abri.

Cette fuite des capitaux a fait plonger le rouble...

C’est pourquoi vendredi la banque centrale russe a décidé de relever son principal taux d'intérêt. Pour la deuxième fois en un mois. Le taux directeur est maintenant à 7,5 %. À titre de comparaison, celui de la zone euro est de 0,5 %. Relever le loyer de l'argent pour défendre le rouble, mais aussi pour juguler l'inflation qui flambe, c'est indispensable, mais c'est calamiteux quand l'économie tourne déjà au ralenti, car quand les taux grimpent les entrepreneurs comme les consommateurs arrêtent d'emprunter pour investir ou pour acheter.

La récession parait de plus en plus inévitable en Russie. Dans ce contexte délabré, la sanction des agences de notation a succédé à celles des diplomates. Vendredi Standard and Poor’s a dégradé la note russe à un triple B assorti d'une perspective négative, la dette russe est maintenant au bord de la catégorie dite spéculative. Dans l'immédiat ce n'est pas catastrophique, car l'État russe est peu endetté, mais sa machine à cash, l'exportation du gaz et du pétrole, pourrait s'essouffler si le cours du baril retombe. Et dans ce cas il lui faudrait emprunter dans les pires conditions. On voit bien que les sanctions mettent l'économie russe sous haute pression.

Pour le moment le secteur de l'énergie n'est pas concerné par la nouvelle vague de sanctions

C'est pourtant là où le bât blesse à Moscou. Puisque ce sont les exportations de pétrole et de gaz qui lui fournissent des réserves de change, qui équilibrent sa balance commerciale et bien sûr qui remplissent les caisses de l'État. Mais un éventuel embargo sur le gaz russe c'est aussi tirer une balle dans le pied de l'économie européenne déjà mal en point. Car la Russie fournit à l'Europe le tiers du gaz importé.

Dans la gamme des sanctions économiques, l'embargo sur le gaz, c'est l'équivalent de l'arme atomique, utile pour la dissuasion, mais aux effets dévastateurs une fois déclenchée. Le conflit pourrait bien contaminer l'ensemble des économies de la planète. C'est déjà le ressenti des bourses qui depuis vendredi perdent du terrain à cause de la tension grandissante en Ukraine.
 



♦ En bref dans l'actualité économique :

Ce matin en Chine, le travail a repris chez le plus grand fabricant mondial de chaussures

Depuis 15 jours la société Yue Yuen était paralysée par une grève très suivie dans la ville de Dong Guan. Les dizaines de milliers d'ouvriers ont pour la plupart repris le travail ce matin, dans une ambiance morose, à cause de la pression policière (une soixantaine d'entre eux ont été arrêtés), et surtout parce qu'ils n'ont pas obtenu gain de cause sur leur principale exigence, à savoir une meilleure couverture sociale.

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