La récession actuelle est la plus longue jamais connue par l'Italie depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale. D'après les dernières estimations de l'office italien des statistiques, le ralentissement de la croissance sera même plus important que prévu. Le produit intérieur brut va reculer cette année de plus de 2%, 2,1%.
C'est la correction la plus pessimiste à ce jour. Un dixième d'écart en point de croissance, ça n'a l'air de rien, mais c'est ce qui fait basculer ce pays dans un déficit public supérieur à 3% alors qu'il a fait une vraie purge pour le ramener dès 2012 en dessous du seuil sacré fixé par Bruxelles.
L'idée de sortir des clous est insupportable pour le ministre de l'Économie. Il menace de démissionner si l'engagement à la rigueur budgétaire devait être remis en cause. Une nouvelle crise politique en vue ? Il ne manquerait plus que ça pour plomber l'économie. L'instabilité gouvernementale générée par les coalitions disparates, c'est le drame du gouvernement Letta qui doit donc mener de front deux priorités inconciliables: tenir le budget tout en relançant la croissance.
Pour respecter son engagement, l'Italie doit trouver 2 milliards d'euros
C'est-à-dire solliciter une nouvelle fois les contribuables. Une raison de plus de les dissuader de consommer. La dépense est en berne, en baisse de 3%, tandis que l'épargne atteint à nouveau des sommets. En clair les Italiens sont pétrifiés, par la peur du chômage, la peur des impôts.
La relance ne passera donc pas la demande intérieure. Dans l'immédiat, le salut de l'Italie ne peut venir que de l'extérieur d'après Céline Antonin, économiste de l'OFCE spécialiste de l’Italie. De ses principaux partenaires commerciaux, ses voisins. Grâce à la reprise encore timide en France, mais très sensible en Allemagne, l'Italie peut espérer doper ses exportations. Ce qui induirait la relance des investissements et donc enfin la croissance.
La puissance exportatrice de l'Italie, c'est un atout de la botte
L'Italie peut se targuer d'avoir une balance commerciale excédentaire. Mais cette belle vitrine est trompeuse. En Vénétie, rebaptisée la troisième Italie, par opposition au sud déshérité et au nord industriel, on trouve effectivement les petites et moyennes entreprises très fortes sur des secteurs de niche, elles n'ont donc pas peur de la concurrence.
En revanche c'est plus compliqué pour les secteurs fortement consommateurs de main d'oeuvre, de moins en moins compétitifs. Alors que l'Espagne fait de la déflation salariale depuis deux ans, que l'Allemagne comprime les salaires, l'Italie a laissé les coûts salariaux s'envoler et sa bureaucratie enkyster la dynamique des entreprises. Quant au montant investi en recherche investissement, c’est presque deux fois moins bien que la moyenne européenne.
Et cela ne date pas d'hier. Selon un rapport sur l’industrie dans les 28 pays membres de l'Union européenne publié aujourd'hui à Bruxelles, l'Italie n'est plus dans le peloton de tête où l’on trouve la France et l’Allemagne et des pays scandinaves, mais dans le groupe intermédiaire des pays en difficulté comme le Portugal, la Grèce ou la Slovénie.
Pas très rassurant pour la troisième économie de la zone euro. Corriger ces faiblesses structurelles, c'est le grand chantier que Rome doit maintenant ouvrir pour retrouver le chemin de la croissance.