En ce moment, c'est la roupie indienne qui accuse la chute la plus spectaculaire face au billet vert. Mais on a eu précédemment le décrochage de la lire turque, du réal brésilien ou encore du rand sud-africain. Pour ces pays exportateurs, cela pourrait être une bonne nouvelle, cela fait baisser le prix de leurs marchandises.
Mais en contrepartie la facture des importations flambe et alimente l'inflation déjà trop élevée, et puis le coût de leur dette libellée en dollar s'envole. D'où le vent de panique qui souffle un peu partout sur les bourses des pays émergents et les déclarations tonitruantes de leurs dirigeants.
On les a entendu ce week-end aux Etats-Unis à Jackson Hole où étaient réunis les banquiers centraux du monde entier. On a entendu ceux qui ont fait le déplacement. Beaucoup ont jugé plus prudent de rester chez eux pour gérer au mieux la crise monétaire. Le patron de FED américaine Ben Bernanke était également absent, c'est pourtant lui qui était interpellé par les quelques représentants des pays émergents.
Ce qu'ils attendent aujourd'hui du patron de la Banque centrale américaine ce sont des annonces claires et précises de nature à rassurer les investisseurs sur la fin progressive de l'assouplissement monétaire. Car à partir du moment où Ben Bernanke a évoqué la fin de cette politique accommodante, au printemps, les marchés émergents ont été déstabilisés par la fuite rapide des investisseurs. Les opérateurs ont pris les devants parce qu'ils anticipent le retour des gains juteux sur les marchés américains.
Pour éviter cette bérézina pour les émergents, les banquiers centraux qui pratiquent à des degrés divers l'assouplissement monétaire, que ce soit en Angleterre, dans la zone euro ou au Japon, devraient coordonner leur action a t-on suggéré ce week-end à Jackson Hole. C'est ce qu'ils ont fait pendant la crise, ils sont donc capables de s'entendre même si cela n'entre pas dans leur mandat.
Aujourd'hui, les émergents se plaignent de voir leur monnaie se déprécier, mais il y a quelques mois ils se lamentaient parce que la politique monétaire américaine renforçait artificiellement leur devises. C'est pour quoi, la plupart des dirigeants des pays émergents sont mal à l'aise dans leur plaidoyer. Le Brésil, par exemple, qui fustigeait il y a quelques mois la politique américaine, fait profil bas. Sans attendre un signe de Washington, ce pays a décidé de consacrer 55 milliards de dollars à la défense de sa monnaie.
Mais certains n'ont pas les moyens d'intervenir, c'est le cas de l'Afrique du Sud. Et puis la baisse des devises des émergents n'est pas seulement une conséquence de la politique américaine, c'est aussi le révélateur des faiblesses de leurs économies. La Turquie par exemple dépend trop des capitaux étrangers pour ses investissements de long terme, cette légèreté se retourne contre elle aujourd'hui.
Plusieurs observateurs estiment par ailleurs que la roupie indienne ou le rand sud-africain étaient surévalués. Pour ces pays, la solution passe par des réformes structurelles et non par un simple ajustement monétaire. Des choix douloureux en terme électoral, et longs à mener.