Arnaud Montebourg est sur tous les fronts pour empêcher la fermeture des usines ou promouvoir leur redémarrage. Mais parfois, le contexte extérieur impose son propre rythme. Dans le cas de Renault, le ministre assure par exemple avoir obtenu la venue en France d'une partie de la production des véhicules de Nissan, histoire de faire passer la pilule des 7 500 suppressions de postes annoncées il y a quelques jours. Ce marchandage aurait l’assentiment de Carlos Ghosn, mais celui-ci reste discret pour le moment sur ce sujet. Pas question de faire des promesses tant qu'il n'a pas obtenu ce qu'il cherche sur les sites français : que les ouvriers travaillent plus pour gagner la même chose, le temps que le marché reparte. C'est l'objet de l'accord de compétitivité que le patron de Renault négocie en ce moment.
Car les chaînes de montage françaises sont bien trop chères par rapport à celles de l'Espagne, où Renault a également des usines. Chez le voisin ibérique, où le chômage touche un actif sur quatre, les syndicats acceptent de plus en plus de sacrifices pour préserver l'emploi. Et il n'y a pas que l'automobile qui est concerné. Le patron du groupe français Five, qui fournit des moteurs à Airbus, a déclaré cette semaine qu'il redoutait la concurrence des Espagnols, là encore mieux-disant en raison d'un avantage sur le coût du travail. Cela ne veut pas dire que les salariés français sont trop bien payés, mais que les moins bien lotis les cannibalisent en quelque sorte.
Le coût du travail, seule variable d’ajustement ?
Il n'y a pas que le coût du travail qui joue sur la compétitivité, mais il fait partie des éléments facilement contrôlables que les industriels prennent en compte quand ils doivent décider à court terme du sort d'une usine. Aux Etats-Unis, les salaires ont baissé à cause de la crise de 2008 et le prix de l'énergie a chuté avec la production de gaz et de pétrole de schiste. Ce qui a conduit les entreprises américaines à relocaliser chez eux une partie de la production externalisée. Mais ces deux conditions, coût du travail et énergie meilleure marché, ne sont pas du tout réunies en France, le reshoring américain, ou relocalisation pris en modèle par Arnaud Montebourg ne pourra donc pas avoir la même ampleur.
L’énergie, une variable trompeuse
La France n’a pas de pétrole, elle a dit non au gaz de schiste, mais son électricité est néanmoins parmi la moins chères d'Europe grâce au parc nucléaire. Et pourtant cela ne suffit pas toujours. Le groupe minier Rio Tinto a décidé de fermer le site de Saint-Jean-de-Maurienne parce qu'EDF n'était pas en mesure de lui proposer un nouveau contrat meilleur marché, tandis que les Norvégiens ont fait un effort sur le prix de l'électricité pour conserver leur site métallurgique. Rio Tinto a donc sacrifié le site français. Le volontarisme affiché par le gouvernement français doit donc irriguer tout le tissu industriel français pour avoir des chances de porter.