Le pari thaïlandais pour faire remonter les cours du caoutchouc

La Thaïlande semble réussir avec le caoutchouc ce qu'elle a échoué à réaliser avec le riz : faire remonter les prix mondiaux tout en accordant un prix minimum aux planteurs.

Au début du mois de janvier, les planteurs manifestaient leur mécontentement dans le sud de la Thaïlande, la région de l'hévéa. Le prix qu'on leur offrait pour le kilo de caoutchouc n'était plus ce qu'il avait été un an auparavant, lorsqu'on pouvait l'exporter sans problème à plus de 6 dollars ! Désormais, il n'en valait plus que la moitié. 6 dollars 50 c'est le prix fou qu'avait atteint le kilo de feuilles de caoutchouc fumé, à la bourse de Tokyo, en février 2011. C'était avant l'annonce que les ventes de voitures venaient de chuter en Chine, cet hiver-là. Avant le tsunami au Japon qui désorganisa toute l'industrie automobile asiatique, et donc freina les commandes de pneus, première destination du caoutchouc naturel. Avant que Goldman Sachs ne siffle la fin de la récréation pour les investisseurs qui avaient massivement parié sur le caoutchouc. Et bien sûr, avant la crise de la dette européenne qui reprit le devant de la scène à l'été. La dégringolade des cours du caoutchouc qui s'en suivit fut aussi violente que la hausse déraisonnable qui l'avait précédée.

Jusqu'au début de l'année, les principaux producteurs, Thaïlande, Indonésie, Malaisie, n'avaient pas pris le risque d'organiser une rétention des exportations, comme ils l'avaient fait en décembre 2008, pour faire remonter les cours : cette fois, les prix restaient tout de même bien au-dessus des coûts de production, il n'était pas question de priver les producteurs de cette manne. Mais le gouvernement thaïlandais craignant les violences dans le Sud, toujours prompt aux révoltes, a agi de son côté, en annonçant qu'il achèterait 200 000 tonnes de caoutchouc à ses planteurs à un prix garanti. Cette seule annonce a fait remonter les cours très régulièrement à la bourse de Tokyo, ils ont regagné 25 % depuis le début de l'année. Un impact psychologique sur le marché, où les investisseurs ont timidement fait leur retour, mais aussi un impact réel puisque, attendant le prix promis par le gouvernement, les planteurs avaient cessé de vendre leur latex, et que les exportations thaïlandaises avaient donc chuté. Le pari de Bangkok est périlleux, alors que la demande chinoise de caoutchouc est inexistante, tant les stocks en Chine sont pleins à ras bord. Il ne faudrait pas que les cours du caoutchouc rechutent, ou la Thaïlande, tenue par ses obligations de prix minimum aux planteurs, mais aussi aux riziculteurs, serait ruinée.

Partager :