Le marché européen du carbone est en surplus : il y a trop de quotas aujourd'hui, après les périodes de récession et de ralentissement économique successives en Europe depuis 2008, qui ont freiné l'activité industrielle, la consommation d'énergie et donc les émissions de gaz à effet de serre - sans que cela ne signifie pour autant de véritables efforts en matière de pollution ou d'efficacité énergétique.
On pensait que l'entrée des entreprises du secteur aérien dans le marché carbone, aux côtés des 13 000 usines et centrales thermiques déjà concernées, pourrait résorber ce surplus et serait en mesure de doper le cours de la tonne de CO2. C'est l'inverse qui s'est produit, avec les pressions de la Chine pour que le transport aérien ne soit pas concerné par ces contraintes.
L'effondrement du prix du CO2 s'est enfin aggravé depuis lundi 2 avril : le marché a été surpris d'apprendre que les émissions de gaz à effet de serre avaient baissé de 2 et demi % en Europe en 2011, alors qu'on s'attendait à une légère hausse de la pollution étant donné que l'Allemagne avait renoncé à ces centrales nucléaires pour recourir plus au charbon. Il semblerait que le ralentissement économique l'an dernier, les températures très douces et le plus grand recours que prévu aux énergies éoliennes et solaires aient permis une diminution ponctuelle des émissions - le rythme est loin d'être suffisant néanmoins si l'on veut empêcher un réchauffement climatique de plus de 2°C d'ici 2050.
La solution pour redonner une valeur à la tonne de CO2 et donc une raison d'être à ce système, serait de retirer l'excédent de quotas. C'est ce que préconise ardemment le Parlement européen, mais aussi certains milieux d'affaires, y compris les plus grandes compagnies énergétiques pourtant dévoreuses de quotas carbone... Mais les Etats européens réticents à rajouter des contraintes environnementales à leurs entreprises en cette période de crise, et avant tout la Pologne, encore très dépendante du charbon, risquent fort de bloquer tout initiative en ce sens, même s'il s'agit de sauver le marché européen du carbone, le premier au monde.