Depuis le mois d'août, début de la dégringolade des cours des matières premières, les prix du minerai de fer avait gardé une santé insolente contrairement aux autres métaux de base. Le cuivre s'était instantanément effondré car c'est le métal qui reflète par excellence la conjoncture économique et avant tout l'humeur des investisseurs. Le maintien des prix du fer à des niveaux historiquement élevés laissait penser que l'économie réelle, en tout cas en Chine, n'était pas affectée par les problèmes financiers de l'Europe ou par le ralentissement américain.
C'est désormais du passé. Depuis quelques semaines, les aciéristes chinois, premiers consommateurs de minerai de fer de la planète, ont ralenti le rythme de leur production pour enrayer la chute des prix des barres d'acier moins demandées, alors que le bâtiment ou la construction ferroviaire marquent le pas. Il s'agit d'un phénomène aggravé par les difficultés des entreprises à obtenir des crédits. Des fourneaux ont donc été immobilisés par les aciéristes chinois, qui ont reporté, voire carrément annulé leurs livraisons de minerai de fer, préférant puiser dans leurs réserves. Il en résulte que le prix du fer à l'entrée des ports chinois a connu une chute brutale au cours des deux dernières semaines. Encore à un pic historique de 180 dollars au début du mois de septembre, le prix de la tonne de minerai de fer est repassé sous le seuil des 150 dollars sur le marché spot, son plus bas niveau de l'année.
Le plus grand producteur mondial de fer, le Brésilien Vale, s'est adapté. Il a déjà annoncé qu'il reverrait le prix de ses contrats trimestriels ; initialement basés sur la moyenne des prix spot du trimestre précédent, très élevés, les contrats vont tenir compte de la chute actuelle des prix spot, quitte à être corrigés en fin de période. Les deux autres concurrents anglo-australiens, BHP et Rio Tinto, n'ont pas d'autre choix que de s'aligner s'ils veulent conserver leur part de marché. L’Australie, dont le premier produit d'exportation est le fer, et qui vend 70% de son minerai à la Chine, craint déjà les répercussions sur sa monnaie : la valeur du dollar australien pourrait fondre de 10% par rapport au dollar américain d’ici la fin de l’année.