Air France, la compagnie aérienne française a longtemps été un fleuron national, synonyme d'excellence en matière de transport aérien. Mais depuis plusieurs années, elle est en perte de vitesse. Née en 1933, Air France a connu ses heures de gloire jusqu'à la fin des années 80. Subventionné par l'Etat, car déficitaire structurellement à ses débuts, le transport aérien français va se structurer et Air France devenir l'une des compagnies les plus prestigieuses au monde.
Air France connait une croissance exponentielle et résiste même dans les années 70 à l'avènement du tourisme de masse et à l'arrivée des charters. Conquérante, elle évince ses concurrents. Forte de sa suprématie la compagnie française ne s'inquiète pas des nouveaux arrivants : les compagnies low cost. Pourtant le vent commence à tourner.
Vers la fin des années 90, avec la déréglementation du ciel européen, Air France affronte les premières difficultés. En 2003, Air France décide de grossir pour mieux résister aux nouveaux venus et se marie avec le Hollandais KLM ce qui la propulse, un temps, leader mondial. Un atout qui aurait dû lui permettre de conserver sa position dominante, mais la compagnie française rate tout simplement le virage du low cost.
Elle tente de rattraper le retard et en 2004 créé, non sans heurt, sa propre branche low cost Transavia puis Hop qui opèrent sur les courts et moyens courriers, là où la concurrence fait rage. Le développement des compagnies low cost a radicalement modifié le marché du transport aérien en Europe, et déstabilisé les majors. Alors qu'Air France négocie avec ses salariés la diversification de son offre, des petites compagnies comme Ryanair ou Easyjet pratiquent une politique très agressive et offrent des prix encore jamais vus.
Air France est mal positionnée, piégée dans un marché segmenté en deux par d'un côté les compagnies à bas coût, et de l'autre les compagnies haut de gamme avec pour concurrents de nouveaux acteurs venus d'Asie ou des pays du Golfe. Des compagnies dont les charges ne sont pas les mêmes que celles d'Air France. Et c'est là que le bât blesse. La compagnie française souffre de coûts plus élevés, de réglementations plus lourdes et de contraintes sociales plus importantes que ses concurrents.
La concurrence du low cost
La menace est réelle. Ce ne serait pas la première compagnie à disparaître du paysage aérien. La Sabena, Swissair ou encore des compagnies américaines ont connu la faillite. Il semble que certains salariés du groupe n'aient pas vraiment pris la mesure de l'enjeu. Les pilotes sont montrés du doigt. Leur dernière grève aurait coûté 500 millions d'euros à l'entreprise. Accusés de corporatisme, ils restent fermes dans les négociations.
Un échec qui a conduit la direction à annoncer la suppression de près de 3 000 postes d'ici 2017, pour gagner en productivité et redevenir concurrentielle. L'Etat a aussi sa part de responsabilité, selon les syndicats. Il a privatisé Air France en 2003, beaucoup trop tard, et est resté actionnaire à hauteur de 16%. Il a préféré la carte des demi-mesures, plus indolores, à celle d'une véritable restructuration. Aujourd'hui, la valeur boursière d'Air France n'est plus que de 2 milliards d'euros, alors que Ryanair en vaut 18 et Delta Airlines avoisine les 32 milliards.
Aujourd'hui, la compagnie se distingue davantage par ses grèves à répétition que par son attractivité. Air France est en crise depuis 20 ans. En 1993, la direction de l'époque avait tenté une restructuration avec son « plan de retour à l'équilibre » qui s'est soldé par un échec.
D'autres tentatives ont émaillé la vie du groupe sans jamais apporter de solution pérenne à la viabilité de l'entreprise, jusqu'aux violences de lundi 5 octobre qui mettent à nu l'impossible dialogue social. Un comble pour le président Hollande qui l'a érigé en principe fondamental. Pourtant d'autres compagnies ont su se réformer. Alors que la direction d'Air France a choisi de réduire sa voilure, sa concurrente la Lufthansa, elle, ouvre de nouvelles destinations, longs courriers.
La direction a redit ce matin que sa porte restait ouverte. Il n'est peut-être pas trop tard, le marché de l'aérien est en plein essor. Quatre milliards de passagers sont attendus d'ici à 2030.