Les chômeurs sans aucune activité ont été 26 200 de plus, fin avril, par rapport à fin mars. Sur un an, l'augmentation est de 5 %. Si l'on ajoute les demandeurs d'emploi qui ont exercé une activité réduite durant la période, on atteint 5,645 millions de personnes inscrites à Pôle emploi. Leur nombre a augmenté de 1 % en un mois et de 7 % en un an.
Parmi les indicateurs marqués au rouge vif : le chômage des seniors (+8,7 % en un an) et le chômage de longue durée (+10,2 % sur un an). Même celui des jeunes, qui avait connu une accalmie grâce à la politique de l'emploi du gouvernement, affiche une dégradation en ce mois d'avril 2015.
Rebsamen annonce 100 000 contrats aidés de plus
C'est donc la série noire qui continue pour le gouvernement, mois après mois. Depuis l'alternance, il y a trois ans, les chiffres mensuels du chômage n'ont reculé que quatre fois. Les effets d'une reprise plus ferme de la croissance au premier trimestre ne se font pas encore sentir. Une mauvaise surprise pour l'exécutif, qui attend de récolter les fruits de cette reprise.
L'économie française a progressé de 0,6 % de janvier à fin mars, ce qui rend moins irréaliste l'hypothèse d'une croissance à 1,5 % à la fin de l'année.Or, c'est précisément entre 1,3 et 1,5 % que les économistes s'accordent à fixer le seuil à partir duquel l'économie recommence à créer de l'emploi. En attendant, le ministre du Travail François Rebsamen a annoncé la création de 100 000 contrats aidés supplémentaires en 2015, sur arbitrage du Premier ministre.
Ils viendront s'ajouter aux 450 000 qui bénéficient déjà aux demandeurs d'emploi éloignés du marché du travail. « Des mesures seront annoncées le 9 juin suite aux consultations qui se déroulent en ce moment même, ici à Matignon », explique par ailleurs M. Rebsamen, qui évoque un « décalage incontestable » entre la réalité économique et la situation des embauches à l'heure actuelle.
Le calvaire de françois Hollande n'est pas terminé
Il va falloir être patient, c'est en quelque sorte la réponse du ministre à cette situation : « Il y a un déclage incontestable (...) entre la reprise de l'activité - la croissance au premier trimestre - et l'impact direct sur l'emploi. Le premier effet, c'est l'augmentation de l'intérim. On le constate depuis deux mois ; dans un premier temps, les entreprises augmentent les postes en intérim. Ensuite, on verra les effets, donc il faut continuer à se battre pour maintenir un taux de croissance trimestriel qui nous permette d'atteindre les fameux 1,2 ou 1,5 % ».
Pour François Hollande, en tout cas, l'échec personnel continue pour l'instant, puisque le chef de l'Etat avait fait de l'inversion de la courbe du chômage un indicateur de la réussite de son quinquennat. En septembre 2012, le président espérait même publiquement que l'inversion se produirait avant la fin de l'année suivante. Mais depuis 2012, il a finalement vu affluer 600 000 chômeurs de plus dans le pays.
• La question du sureffectif dans les entreprises
Les mauvais chiffres du chômage en France en avril 2015 représentent la hausse la plus importante depuis des mois. Eric Heyer, économiste à l'Observatoire français des conjonctures économiques (OFCE), évoque une situation de sureffectif dans les entreprises dont les carnets de commandes se sont affaiblis ces dernières années.
Eric Heyer : « Une grosse partie du chômage est conjoncturelle. Les carnets de commandes des entreprises françaises se sont affaiblis au cours des trois dernières années, et les entreprises n'ont pas licencié autant que la chute d'activité l'aurait réclamé. Donc, il y a du sureffectif dans les entreprises, c'est ce qu'elles nous disent très clairement, et le principal frein aujourd'hui, c'est plutôt la croissance économique.
Tant qu'elle n'auront pas absorbé le sureffectif, le chômage continuera à augmenter puisqu'il y a plus d'entrées sur le marché du travail, plus de jeunes qui viennent sur le marché du travail, que de seniors qui partent à la retraite. Le seuil est d'à peu près 150 000. Pour l'instant, le gouvernement avait limité la hausse du chômage en faisant des emplois aidés, ça avait permis de limiter la hausse du chômage des jeunes.
C'est une politique de court terme, qui est bonne. Mais on voit bien qu'il faut pour cela que le nombre d'emplois aidés continue à augmenter et qu'il n'y ait pas que du renouvellement d'emplois aidés. La contrepartie à cela, c'est qu'il faut un budget à mettre en face de ces emplois, et qu'aujourd'hui on est plutôt à contraindre ces budget-là pour respecter nos conditions en termes de déficit public et de dépense publique. »
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