Industrie: la France retourne à la mine

Dans un entretien au Parisien, le ministre du Redressement productif, Arnaud Montebourg, annonce la renaissance d'une Compagnie nationale des mines des France pour prospecter et exploiter le sous-sol français, dans l'Hexagone et Outre-mer, et aussi à l'étranger. C'est la première création d'une entreprise publique en France depuis 20 ans.

Est-ce un tournant pour l'industrie française ? Oui et non. Oui, car depuis quelques décennies le ton est plutôt au désengagement de l'Etat des secteurs de la production afin de laisser agir les entreprises privées jugées plus « performantes ». La dernière création d'une entreprise publique française, c'était en 1993 dans le secteur des biotechnologies.

Mais Arnaud Montebourg parle de renaissance d'une Compagnie nationale des mines. Et là, il s'agit plus d'un retour à une tradition que d'un tournant. En 2007 les Charbonnages de France, un établissement public à caractère industriel et commercial, était liquidé après 60 ans d'existence. Dans les années 1970 les Charbonnages de France employaient 120 000 personnes, mais l'entreprise n'a pas résisté à la fermeture progressive des mines françaises. C'est donc avec cette tradition qu’Arnaud Montebourg veut renouer en créant une société nationale dotée d'un capital de 200 à 400 millions d'euros sur 5 ans.

Elle aura pour mission de prospecter et d'exploiter le sous-sol hexagonal mais aussi, et peut-être surtout, les richesses minières outre-mer, dont la Guyane qui dispose de réserves d'or considérables. Car pour le ministre du Redressement productif un Etat qui ne maîtrise pas son approvisionnement est soumis aux décisions des autres, tant pour les quantités qu'en matière de prix. Or, la France a besoin de lithium pour les batteries des voitures électriques et de germanium pour ses fibres optiques. On ne recherchera plus de charbon mais des métaux rares.

De l’Afrique à l’Amérique du Sud

La Compagnie nationale des mines de France ne se contentera pas d'exploiter le sous-sol français. Certains pays, si l'on en croit Arnaud Montebourg, préféreront discuter de gouvernement à gouvernement, plutôt que d'avoir à faire à des multinationales étrangères, et c'est le cas des pays d'Afrique francophone. La compagnie française se déploiera aussi en Asie centrale et en Amérique du Sud.

Certes, la France a déjà des acteurs privés dans le secteur des mines : Areva et Eramet. Mais le gouvernement souhaite une entreprise minière diversifiée alors qu'Areva est spécialisée dans l'uranium et Eramet dans le nickel et le manganèse.

Le Colbertisme du XXIème siècle

Après l'entrée de l'Etat au capital du constructeur automobile français PSA cette semaine et l'annonce de cette renaissance d'une compagnie nationale dans les mines, on souligne le retour d'une intervention de l'Etat dans la vie économique.

Arnaud Montebourg assume complètement cette politique et il enfonce le clou quand il affirme que « le colbertisme est de retour et c'est un bien ». Le colbertisme, du nom de Colbert, le ministre de Louis XIV, c'est une politique de développement industriel et commercial fermement soutenue par l'Etat. Alors au XXIème siècle cela passe par un Etat actionnaire, qui ne se contente pas de faire le mort dans les conseils d'administrations auquel il participe.

De plus en plus l'Etat intervient dans les choix stratégiques afin de défendre l'emploi en évitant les délocalisations mais aussi les brevets et les technologies françaises.

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