Imperturbable, la Chine a encore une fois refusé de céder aux pressions en faveur d’une réévaluation de sa monnaie. Pourtant les critiques se sont multipliées ces derniers mois. La dernière en date a émané lundi du président américain en personne. Barack Obama, qui doit rencontrer jeudi 23 septembre son homologue Hu Jintao à New York en marge de l’Assemblée générale des Nations unies, a promis de continuer à faire pression sur la Chine pour qu’elle laisse sa monnaie se renforcer. « Les relations commerciales doivent être justes. Vous ne pouvez pas nous vendre des choses tandis que nous ne pouvons rien vous vendre », a argumenté M. Obama. La semaine dernière, le secrétaire américain au Trésor, Timothy Geithner avait de son côté accusé la Chine de « maintenir un taux de change rigide » et de retarder ainsi le rééquilibrage de l'économie mondiale auquel se sont pourtant engagés les dirigeants des pays riches et des grandes économies émergentes du G20.
La faiblesse du yuan introduit en effet une forme de protectionnisme qui ne dit pas son nom puisque les produits chinois ne souffrent d'aucune concurrence sur le marché mondial. C'est pourquoi les appels se sont faits ces derniers mois de plus en plus pressants pour que Pékin réévalue sa monnaie. La Chine l’a d’ailleurs déjà fait dans le passé. Pendant trois ans, de juillet 2005 à juillet 2008, les autorités de Pékin ont en effet laissé le yuan s'apprécier de 21% par rapport au dollar. Mais pour faire face à la crise financière, la Chine a décidé de bloquer cet ajustement pour protéger ses exportations et donc son économie. Aujourd’hui certains parlementaires américains estiment que le yuan est sous-évalué de 25 à 40%. Ils réclament en conséquence des taxes sur les produits chinois importés.
Le yen à son plus haut niveau face au dollar en quinze ans
Ces menaces n’ont toutefois pas ému les autorités chinoises qui ont notamment été confortées dans leur position par l’intervention unilatérale la semaine dernière du Japon sur le marché des changes. Pour la première fois depuis six ans, Tokyo a cherché à affaiblir sa monnaie qui a flambé ces dernières semaines face au dollar pour atteindre son plus haut niveau en quinze ans. La devise japonaise a fait, ces dernières semaines, l’objet d’achats massifs, souvent spéculatifs, largement encouragé par l’incertitude que pèse sur la reprise américaine. Or l’appréciation du yen, devenu valeur refuge, menace d’entraver les exportations nipponnes, moteur fragile de la reprise économique.
L’intervention japonaise a été vivement critiquée par Washington et Bruxelles qui ont notamment dénoncé son caractère unilatéral. Mais pour Tokyo, cette intervention était devenue inévitable pour faire face à une variation jugée trop importante de la parité du yen avec d’autres devises. Le Premier ministre Naoto Kan n’a d’ailleurs pas exclu d’autres interventions sur le marché des changes si le yen venait à s’apprécier trop vite. Il a notamment mis en avant les préjudices causés par une monnaie trop forte sur une économie japonaise embourbée dans la déflation.
Cette détermination du Japon à affaiblir sa monnaie, tout comme le refus de la Chine de réévaluer sa devise sont symptomatiques de l’incapacité des grandes économies de la planète à mettre en place un système monétaire international stable. Longtemps occultée, la question des changes devrait donc s’imposer au prochain sommet du G20 qui doit se tenir les 11 et 12 novembre prochain à Séoul.