Le jury international, présidé cette année par le réalisateur américain Tim Burton, poète macabre de 51 ans, auteur des films à succès comme Edward aux mains d’argent, Mars Attacks !, Charlie et la chocolaterie, et plus récemment Alice au pays des merveilles, remettra la Palme d’or 2010 à l’issue du Festival, le 23 mai. Le palmarès s’annonce déjà décoiffant au vu de la personnalité originale de Tim Burton. Sélectionné en 1995 pour Ed Wood, il n’a pourtant jamais été récompensé à Cannes.
Trois films français en compétition
Au total, dix-neuf cinéastes briguent le célèbre trophée, parmi lesquels huit Européens, dont trois Français, ce qui place la France comme le pays ayant le plus de films en compétition. Mathieu Amalric, 44 ans, Xavier Beauvois, 43 printemps, et Bertrand Tavernier, qui a soufflé ses 69 bougies, défendront ainsi les couleurs du VIIe Art français. Mathieu Amalric, plus habitué à venir sur la Croisette en tant qu’acteur, fera cette fois ses grands débuts dans la compétition cannoise comme réalisateur avec Tournée, dans lequel il incarne un organisateur de spectacles de strip-tease burlesque. Des trois réalisateurs, il est le seul à n’avoir pas été primé à Cannes.
Prix du jury en 1995 avec N’oublie pas que tu vas mourir, Xavier Beauvois présentera, lui, son cinquième long, Des Hommes et des Dieux, qui évoque l’assassinat des moines trappistes de Tibéhirine, en Algérie en 1996, avec au casting Lambert Wilson et Michael Lonsdale.
De son côté, Bertrand Tavernier, récompensé du Prix de la mise en scène pour Un dimanche à la campagne en 1984, présentera La Princesse de Montpensier, rôle tenu par Mélanie Thierry. Drame historique adapté du roman éponyme de Madame de La Fayette, le film retrace les passions et le destin tragique de Marie de Mézières, éprise du duc de Guise, mais contrainte d’épouser le prince de Montpensier.
Le retour de deux « palmés »
Le trio de réalisateurs français sera confronté à deux anciennes Palmes d’or. A commencer par Mike Leigh, récompensé pour Secrets et mensonges en 1996. Le Britannique revient avec Another Year. L’Iranien Abbas Kiarostami, qui avait triomphé en 1997 avec Le Goût de la cerise (ex æquo avec L’Anguille du Japonais Shohei Imamura), revient, lui aussi, avec Copie conforme. Drame sentimental tourné en Toscane avec Juliette Binoche (qui a les honneurs de l’affiche de cette 63e édition du Festival), Copie conforme est le premier film d’Abbas Kiarostami réalisé hors de son pays.
Retour également en compétition du Russe Nikita Mikhalkov, qui propose le second volet de Soleil trompeur, présenté en 1999 ; et du Franco-algérien Rachid Bouchareb avec Hors-la-loi, qui retrace le parcours de trois frères ayant survécu aux massacres de Sétif de mai 1945. Sélectionné sous pavillon algérien, Hors-la-loi a déjà suscité la polémique avant même sa projection. Auteur d’Indigènes (Prix d’interprétation masculine attribué collectivement en 2006 à Sami Bouajila, Jamel Debbouze, Samy Naceri, Roschdy Zem et Bernard Blancan), Rachid Bouchareb est accusé en France de « falsification » de l’Histoire de la colonisation. Son retour sur la Croisette promet donc d’être animé.
Autres cinéastes appelés à fouler le tapis rouge : l’Italien Daniele Luchetti, de retour avec La Nostra Vita, le Hongrois Kormél Mondruczo avec Tender Son - The Frankenstein Project, et le Mexicain Alejandro Gonzalez Inarritu, qui a signé à Barcelone Biutiful, avec Javier Bardem en vedette.
Une forte présence asiatique et deux surprises de taille
Face aux vétérans, aux habitués, et aux nouveaux venus sur la Croisette, l’Asie devra sortir le grand jeu. Cinq de ses réalisateurs sont en course : les deux Sud-Coréens, Lee Chang-dong, ancien ministre de la Culture, et Im Sangsoo, avec respectivement Poetry et Housemaid ; le Japonais Takeshi Kitano, qui effectue un retour au film de yakuzas avec Outrage ; le Thaïlandais Apichatpong Weerasethakul (déjà sélectionné par le passé) avec Loong Boonmee Raleuk Chaat ; et le Chinois Wang Xiaoshuaï avec Rizhao Chongqing.
Deux pays, absents jusqu’ici, font une entrée remarquée dans la sélection. Il s’agit du Tchad où Mahamat-Saleh Haroun a tourné Un homme qui crie, et de l’Ukraine qui présente You. My Joy, première fiction du documentariste Sergei Loznitsa.
Un seul Américain en course
Fair Game, thriller d’espionnage de Doug Liman, est l’unique film qui représente le cinéma outre-Atlantique. Il revient sur les mésaventures de Valerie Plame (incarnée par Naomi Watts) dont le statut d’agent de la CIA avait été révélé par l’administration de George W. Bush pour discréditer son époux, le diplomate Joseph Wilson (Sean Penn), opposé à la guerre en Irak.
Soulignons que les longs métrages signés des grands noms du cinéma anglophone se trouvent plutôt hors compétition, à l’image de You Will Meet A Tall Dark Stranger, dernière romance de Woody Allen qui, une fois de plus, a refusé de concourir pour la Palme d’or, et de Tamara Drewe, œuvre du Britannique Stephen Frears, ou encore de Wall Street – Money Never Sleeps, dans lequel Michael Douglas reprend le rôle du financier véreux Gordon Gekko sous la direction de l’Américain Oliver Stone.
Idem pour Robin des Bois. Film à grand spectacle du Britannique Ridley Scott (Gladiator, Thelma et Louise, Blade Runner), il réunit à l’affiche Russell Crowe dans le rôle titre, et fera l’ouverture du Festival le mercredi 12 mai. L’actrice franco-britannique Kristin Scott Thomas, en tant que maîtresse de cérémonie (un rôle qu’elle avait déjà endossé en 1999), aura la charge de déclarer « ouvert » le festival de films le plus glamour et le plus prestigieux du monde.
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Les 18 films en compétition pour la Palme d’or
Tournée, de Mathieu Amalric (France)
Des Hommes et des Dieux, de Xavier Beauvois (France)
Hors-la-loi, de Rachid Bouchareb (Algérie)
Biutiful, de Alejandro Gonzalez Inarritu (Mexique)
Un homme qui crie, de Mahamat-Saleh Haroun (Tchad)
Housemaid, de Im Sangsoo (Corée du Sud)
Copie Conforme, d'Abbas Kiarostami (Iran)
Outrage, de Takeshi Kitano (Japon)
Poetry, de Lee Chang-dong (Corée du Sud)
Another Year, de Mike Leigh (Grande-Bretagne)
Fair Game, de Doug Liman (Etats-Unis)
You. My Joy, de Sergei Loznitsa (Ukraine)
La Nostra Vita, de Daniele Luchetti (Italie)
Soleil trompeur 2, de Nikita Mikhalkov (Russie)
Tender Son - The Frankenstein Project, de Kormél Mondruczo (Hongrie)
La Princesse de Montpensier, de Bertrand Tavernier (France)
Rizhao Chongqing, de Wang Xiaoshuaï (Chine)
Loong Boonmee Raleuk Chaat, d'Apichatpong Weerasethakul (Thaïlande)
PS : le lundi 10 mai 2010, les organisateurs du Festival ont décidé de sélectionner un 19e film en compétition : Route Irish, de Ken Loach (Grande-Bretagne)