C’est en pleine tourmente financière, lors du sommet de Londres en avril 2009, que les pays du G20 ont confié au Fonds monétaire international la délicate mission de réguler la finance mondiale et de prévenir ainsi tout nouvel effondrement du système financier international. Après plus d’un an de concertations, le Fonds s’apprête donc à remettre ses propositions aux argentiers des vingt plus grandes économies de la planète. Et même s'il ne s'agit que d'un rapport d'étape, l'intention du FMI est bien d'imposer deux nouvelles taxes au secteur financier dans son ensemble, qu’il s’agisse des banques bien sûr mais aussi des fonds d'investissements ou encore des assurances.
La première de ces taxes, appelée Contribution pour la stabilité financière, sera prélevée sur les actifs de ces établissements. Elle est destinée à financer tout plan de sauvetage des banques qui serait décidé à l'avenir. Il s’agit très clairement de faire payer au secteur la réparation de ses excès et d’épargner les contribuables qui ont jusqu’à présent été sollicités. Ce prélèvement pourrait varier selon les établissements, en fonction notamment des risques qu’ils prennent ou qu’ils font encourir au système financier.
Une taxe sur les profits et les rémunérations
La seconde contribution, baptisée Taxe sur les activités financières, serait prélevée sur les profits et les rémunérations de ces établissements. Elle pourrait servir à renflouer les caisses des Etats très durement frappés par la crise et qui ont vu leurs déficits publics s’aggraver avec la mise en place des plans de relance.
Ces propositions du FMI sont toutefois loin de faire l'unanimité. L’économiste Charles Wyplosz, chercheur au Centre européen des hautes études internationales et du développement de Genève, estime ainsi qu’elles ne préviennent en rien l’émergence de nouvelles crises. « Je peux comprendre que les gouvernements, qui doivent faire face à des problèmes budgétaires épouvantables, cherchent des financements par tous les moyens, a-t-il confié. Ils peuvent donc être tentés de taxer les banques qui ont renoué avec les profits cette année. Mais il s’agit de taxation pour de la taxation et non pas des mesures préventives pour soutenir de nouvelles crises », a-t-il conclu.
Des oppositions nombreuses
Cet avis est très largement partagé par les professionnels du secteur au premier rang desquels la Fédération bancaire européenne. « Deux taxes, c’est trop », a ainsi estimé son secrétaire général Guido Ravoet qui a dénoncé une « punition » des banques. Il a également mis en garde contre les risques que vont faire peser ces nouveaux prélèvements sur la fragile reprise de l’économie mondiale. « Comme toutes taxes, ces prélèvements auront des incidences sur les profits des banques, a ainsi rappelé Guido Ravoet. Ils auront donc nécessairement un impact sur la capacité des banques à débloquer des crédits aux entreprises, donc un impact sur l’économie réelle », a-t-il insisté.
Ces menaces à peine voilées ne semblent pour le moment affecter ni le FMI, ni les dirigeants des grandes économies de la planète. Plusieurs pays ont en effet approuvé les propositions du Fonds. Au nom des 27, Michel Barnier, le commissaire européen chargé des services financiers, a ainsi déclaré dès mercredi soutenir les projets du FMI soulignant notamment que l'Europe travaillait déjà dans ce sens. Un pays comme l'Allemagne a d'ailleurs déjà pris les devants en adoptant le 31 mars dernier le principe de l'instauration d'une taxe sur les banques. D'autres pourraient également suivre.
Outre-Atlantique, les choses sont en revanche plus compliquées. Car si l’administration Obama est plutôt favorable, sur le principe, à la mise en place de telles taxes, l’hostilité de Wall Street et surtout du Congrès est ouverte. Il faudra également prendre en compte la farouche opposition de pays comme le Japon ou encore le Canada qui préside actuellement le G20.