Rio Tinto ou les difficultés des entreprises étrangères en Chine

Le procès de quatre employés du géant minier anglo-australien Rio Tinto s'ouvre ce lundi 22 mars 2010 à Shanghai. Ils sont accusés d'espionnage industriel et de corruption. Cette affaire n'est pas la seule à mettre en évidence un climat difficile pour les entreprises étrangères en Chine.

Les entreprises étrangères qui souhaitent commercer avec la Chine ou s'y installer dénoncent des conditions d'accès au marché chinois de plus en plus difficiles, alors qu'on s'attendait plutôt à une ouverture progressive avec l'entrée de la Chine à l'Organisation mondiale du commerce (OMC). Plusieurs affaires en cours viennent rappeler l'imbrication, dans l'empire du Milieu, entre économie, justice et politique ce qui complique encore les relations.

Les salariés de Rio Tinto, dont le directeur du bureau de Shanghai, ont été arrêtés en juillet 2009 alors même que les négociations sur le prix du minerai de fer vendu par des groupes comme Rio Tinto aux sidérurgistes chinois étaient en mauvaise passe. Et le procès a lieu au moment où de nouvelles négociations se déroulent. De-là à voir un lien entre les deux, et une manière de peser sur les discussions, il n'y a qu'un pas.

Rudes déconvenues

Et un pas vite franchi. D'autant que le conflit qui oppose les autorités chinoises à Google est également hautement politique. Google devrait annoncer ce lundi 22 mars s'il se retire ou non de Chine en raison de la censure imposée par les autorités chinoises aux moteurs de recherche sur internet. Les entreprises qui partent pleines d'espoir à l'assaut du marché chinois et de son milliard de consommateurs s'exposent parfois à de rudes déconvenues. Souvenons-nous des déboires rencontrés par Danone qui a mis des années à régler un divorce douloureux avec son partenaire chinois devenu concurrent Wahaha.

Plus généralement, les investisseurs étrangers dénoncent les obstacles qui sont élevés devant eux et qui faussent, disent-ils, la concurrence avec les entreprises chinoises. Fort opportunément à l'ouverture du procès Rio Tinto, la chambre américaine de commerce publie un sondage dans lequel les entreprises américaines de haute technologie s'inquiètent des restrictions mises à l'obtention de marchés publics. Elles sont près de six sur dix pour estimer que cela va affecter leurs activités en Chine.

Le chaud et le froid

Est-ce une menace réelle ? Peut-on imaginer un retrait des entreprises étrangères implantées en Chine ? Non, car personne n'y a vraiment intérêt. C'est pourquoi la Chine souffle le chaud après le froid. C'est ainsi qu'a eu lieu ce week-end à Pékin un forum économique avec les responsables d'une quarantaine d'entreprises mondiales dont Rio Tinto mais aussi les majors du pétrole, de la banque comme HSBC ou Morgan Stanley, et de l'industrie comme Michelin ou Bombardier.

Les entreprises étrangères aussi mettent en balance les difficultés à travailler en Chine avec l'importance des activités à y déployer. Ainsi Microsoft a fait savoir qu'il continuerait à se développer en Chine quelque soit par ailleurs la décision de Google. Avec plus de 350 millions d'utilisateurs, la Chine est l'un des gros marchés pour l'internet au monde. Quant aux entreprises allemandes, elles sont de plus en plus séduites : selon une enquête plus d'une entreprise interrogée sur trois envisage d'investir cette année en Chine.

Et même les conflits en cours n'empêchent pas les contrats : à la veille de l'ouverture du procès de Shanghai, Rio Tinto et le groupe chinois Chinalco ont conclu un accord pour l'exploitation conjointe d'une mine de fer en Guinée. De même Petrochina s'est allié à l'Anglo-Néerlandais Royal Dutch Shell pour racheter la compagnie d'énergie australienne Arrow Energy. Cela va lui permettre de s'implanter dans le secteur gazier australien.

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