Fille cadette d’une grande famille de paysans aisés, Elena Talanina grandit en Lituanie jusqu’au jour où, le 24 mars 1949, les « militaires » viennent les chercher, elle et sa mère à son domicile pour les emmener. Cette expulsion fait suite au refus de son frère de rejoindre le kolkhoze et elle s’explique aussi par leur relative richesse.
Déportées, Elena et sa mère se retrouvent à Bolchaia Mourta (région de Krasnoïarsk), où Elena commence à travailler dans le kolkhoze, en assurant sa propre survie et celle de sa mère, trop âgée pour travailler.
Elle ne retourne jamais à l’école et connaît une adolescence et une jeunesse très dures, faites du travail dans les champs. Elle juge cependant l’accueil sur place plutôt bienveillant, tout en soulignant la pauvreté extrême des habitants et l’absence, de ce fait, de toute aide des voisins ou des pouvoirs locaux. Les premiers temps, Elena et sa mère survivent grâce aux colis envoyés de la Lituanie.
Elle se marie avec un Russe et a très vite des enfants. Cette union détermine en partie sa décision de rester en Russie après sa libération en 1956.
En 1958, Elena et sa famille viennent s’installer à Bratsk, en Sibérie orientale. Ils partagent ainsi le destin des centaines de milliers de paysans soviétiques qui quittent les kolkhozes pour tenter leur chance en ville. A Bratsk, ville-modèle, nouvelle vitrine de l’industrie énergétique soviétique, leur vie quotidienne est difficile.
Aujourd’hui, Elena Talanina, veuve depuis quelques années, parle peu de son passé de déportée, préférant évoquer avec ses petits enfants ses souvenirs de la guerre et des combats entre l’Armée rouge et les Allemands, dont elle a été témoin dans son enfance.