Dans l’histoire de la dissidence cubaine, il y a un évènement qui fait date : le 27 février 2002. Deux jours auparavant, Jorge Castaneda, qui est à l’époque ministre des Affaires étrangères du Mexique, déclare à la presse de Miami que son pays est prêt à accueillir les réfugiés cubains, que les portes de l’ambassade du Mexique à La Havane leur sont ouvertes. Le message est diffusé par la radio anticastriste, Radio Marti. Le message n’est pas perdu pour tout le monde et deux jours après, dans la nuit du 27 février, 21 dissidents s’emparent d’un bus des transports publics et forcent les portes de l’ambassade du Mexique dans l’intention de demander l’asile politique.
Vague d’arrestations
Non seulement les 21 passagers du bus sont arrêtés mais aussi les curieux qui s’attroupent autour de l’ambassade et enfin les défenseurs des droits de l’homme et des droits civiques qui accourent sur les lieux pour tenter d’aider les malheureux. Certains sont relâchés dans les jours suivent mais cet incident va provoquer dans les semaines et les mois qui suivent, une vague d’arrestations sans précédent dans les rangs de la dissidence. Orlando Zapata Tamayo qui a été repéré au cours de manifestations en faveur des droits de l’homme est arrêté une première fois le 6 décembre pour insultes aux autorités. Condamné à trois mois de prison il ressort en mars. Mais le répit est de courte durée : les autorités n’apprécient guère qu’il entame une grève de la faim pour réclamer la libération d’un de ses amis et autre dissident, Oscar Elias Biscet, et cette fois il est condamné à trois ans de prison.
Protestation contre ses conditions de détention
En prison, Orlando Zapata Tamayo commet ce que les autorités cubaines appellent des actes d’insubordination. Mais qui sont des protestations contre ses conditions de détention. Il est par exemple traîné sur le dos dans les couloirs de la prison et en garde des blessures. Il est à nouveau jugé au cours d’un procès encore plus expéditif et qui respecte encore moins ses droits que les précédents. La totalité des peines auxquelles il est condamné attient 36 ans !
Au fur et à mesure qu’il proteste, ses conditions de détention se durcissent. Il est transféré vers une prison très loin de La Havane. Sa mère n’a plus le droit qu’à une visite tous les trois mois or il refuse toute autre nourriture que la sienne. Il y a un peu moins de trois mois, il entame une grève de la faim. Jusqu’aux tous derniers jours, les autorités ont refusé de lui assurer une aide médicale. Il n’a été transféré dans un hôpital que la semaine dernière quand son état de santé était devenu désespéré. Amnesty International avait lancé au début du mois une action urgente en faveur de sa libération.
Etre dissident à Cuba
Oscar Zapata Tamayo appartenait à plusieurs organisations dissidentes : le Mouvement d’alternative républicaine, le Conseil national de la résistance civique et le Directoire démocratique cubain.
Pour Amnesty International, il y a 54 prisonniers politiques à Cuba mais l’organisation concède qu’il y en a peut-être plus. Aucune organisation n’est autorisée à les visiter dans les prisons cubaines, ils sont donc peut-être plus nombreux.
Les dissidents estiment que c’est la première fois depuis une quarantaine d’années, depuis les années 1970, qu’un dissident meurt en prison. Mais là encore impossible d’en être certain.
Réactions cubaines et internationales
La mort d’Orlando Zapata Tamayo suscite de très nombreuses réactions. Dès l’annonce de sa mort, les dissidents de l’intérieur et ceux réfugiés à l’étranger ont réagi sur Twitter ou Facebook.
Réactions aussi internationales. L’Union européenne regrette la mort de ce dissident. La France rappelle qu’elle avait demandé sa libération et déplore que « cet appel à un geste d’humanité n’ai pas été entendu ». En Espagne, la droite demande au Premier ministre José Luis Zapatero de revoir sa politique de rapprochement avec Cuba. Les Etats-Unis exhortent les autorités cubaines à libérer les dissidents qui seraient au nombre de 200, selon les chiffres du département d’Etat.
Quant à la mère d’Orlando Zapata Tamayo, elle demande à la communauté internationale de faire pression sur le gouvernement pour qu’il libère tous les dissidents. Et il y a urgence : une trentaine ont été arrêtés depuis mardi 23 février 2010 pour qu’ils n’assistent pas aux obsèques de leur camarade.