Avec nos envoyés spéciaux à Addis Abeba, Jean-Karim Fall et Christophe Boisbouvier
Il y a un perdant : le colonel Kadhafi et ses alliés d’Afrique de l’ouest. Il y a un gagnant le président Jacob Zuma et ses alliés d’Afrique australe. Le guide libyen est reparti avant même la fin du sommet quasiment humilié. Il a reconnu sa défaite en déclarant : « je suis déçu ». La défaite était prévisible. Les alliés du colonel Kadhafi ont pour la plupart préféré rester chez eux et parmi ses fidèles certains lui ont même dit de renoncer à ses ambitions continentales, à son projet fou d’Etats-Unis d’Afrique.
Le Nigeria était inexistant au cours de ce sommet. La guerre de succession ayant commencé à Lagos depuis l’hospitalisation du président Yar’Adua. L’effacement du puissant Nigeria a permis à l’Afrique australe de s’imposer. Emmenés par l’Afrique du Sud, les Etats de la SADC ont dominé les travaux. Ils ont réussi à se débarrasser du colonel Kadhafi, à imposer la fermeté dans la gestion de la crise malgache, et à proposer un programme de travail réaliste à l’organisation.
Le nouveau président de l’Union Bingu wa Mutharika veut simplement que les enfants d’Afrique s’endorment avec le ventre plein. Pour cela, sa priorité c’est l’autosuffisance alimentaire grâce au développement de l’agriculture.
Madagascar : premier dossier pris à bras le corps
Jacob Zuma et ses amis d’Afrique australe n’ont pas perdu de temps. Dès mardi 2 février, ils ont fait adopter à Addis Abeba, une résolution qui demande au régime « illégal » de Madagascar de mettre fin à ses initiatives unilatérales sous entendu son projet d’élections législatives.
Mieux, le document de l’Union africaine souligne le rôle majeure joué par la SADC, la Communauté des Etats d’Afrique australe, dans le processus de médiation. L’ancien président mozambicain Joaquim Chissano est plus fort que jamais sur ce dossier ; et mardi dans les couloirs tout au long de la salle de conférence à laquelle ils n’avaient pas accès, les observateurs malgaches envoyés discrètement par Andry Rajoelina étaient à l’affût de la moindre information et faisaient grise mine.
L’Afrique du Sud et ses voisins auront-ils la même fermeté à l’égard des autres pays africains qui sont sortis des clous de la démocratie ? Pas sûr. Certes dans le document final de ce sommet, l’Union africaine dénonce la transgression des normes démocratiques, mais à la différence de la CEDEAO, la Communauté des pays d’Afrique de l’Ouest, elle ne condamne pas explicitement les régimes qui changent de Constitution moins de six mois avant une élection. Ce qui permet au Niger d’échapper à toute sanction de l’Union africaine au moins pour l’instant.