Polémique autour des tests ADN pour les enfants de disparus

Le droit à la vérité peut parfois empiéter sur les libertés individuelles, y compris celle de ne pas vouloir connaître ses origines. Ainsi en a décidé le Parlement argentin en votant en novembre une loi qui oblige les personnes soupconnées d’être des enfants de disparus de la dictature des années 70, enlevés à leurs parents et élevés sous une fausse identité, à se soumettre à un test sanguin. Illustration de ce dossier, l'affaire des enfants adoptifs d’Ernestina Herrera de Noble, propriétaire du plus grand groupe multimédia du pays, fait grand bruit.

Avec notre correspondant à Buenos Aires, Jean-Louis Buchet

Perquisition et saisie de sous-vêtements pour effectuer des tests ADN. C’est à cela qu’ont été soumis Felipe et Marcela Noble Herrera. Cette procédure exceptionnelle a été instituée en novembre pour les cas des enfants de disparus des années 70 élevés sous une fausse identité par des proches des militaires. Ces enfants, aujourd’hui âgés de 30 ans et plus, sont recherchés par les Grands-mères de la place de mai, les mères des disparus et grand-mères des enfants de ces disparus.

Or deux de ces grands-mères sont convaincues que Felipe et Marcela, adoptés légalement alors que les militaires étaient au pouvoir, sont leurs petits-enfants. Elles ont donc engagé il y a plusieurs années une procédure judiciaire pour que l’identité des Noble Herrera soit vérifiée. Répondant à l’injonction du juge, Felipe et Marcela avaient réalisé mardi un test au laboratoire national dépendant de la justice, afin que leur ADN soit comparé à celui des parties civiles.

Pour les Grands-mères, qui demandent l’application de la loi votée en novembre, ce test n'est pas suffisant. D’où cette perquisition effectuée le lendemain, pour la réalisation d’un second test pour un autre laboratoire, celui de la Banque nationale des données génétiques comme le prévoit la loi, et une comparaison avec l’ADN de toutes les familles réclamant un petit-fils volé. Etait-ce justifié ? Le fait que la mère adoptive de Felipe et Marcela soit Ernestina Herrera de Noble, la propriétaire du puissant groupe multimédia Clarín, auquel la présidente Cristina Fernández de Kirchner a déclaré la guerre, alimente les suspicions.

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