Avec notre correspondant à Buenos Aires, Jean-Louis Buchet
Peut-on imposer à quelqu’un de connaître la vérité sur ses origines ? Peut-on pour cela l’obliger à se soumettre à un test sanguin ou saisir chez lui un vêtement qui permette de déterminer son ADN ? À ces deux questions, le Parlement argentin a répondu oui, pour des cas particulièrement douloureux : celui des enfants de disparus, enlevés à leurs parents sous la dictature des années 70 pour être élevés, sous une fausse identité, par des familles proches des militaires.
Ces enfants, qui sont aujourd’hui des hommes et des femmes de 30 ans et plus, sont recherchés par les grands-mères de la place de mai, les mères des disparus. Ils seraient près de 500. Les grands-mères en ont retrouvé 99, grâce à l’action de la justice et à un travail de recherche génétique qui fait désormais autorité dans le monde. Dans certains cas, elles butent sur la volonté des présumés petits-enfants enlevés de ne pas connaître la vérité ou, tout simplement, de ne pas voir condamner la famille qui l’a élevée.
La nouvelle loi a suscité des débats, certains craignant qu’au nom de la vérité, on réveille les blessures des victimes d’il y a 30 ans. Le Parlement a donné raison aux grand-mères qui ont également obtenu que leur association et autres organisations de droits de l’homme puissent se porter parties civiles dans les procès contre les familles accusées d’appropriation d’enfants. Manière de s’assurer que les recherches continuent après leur mort.